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14/10/2022

extrait de la nouvelle "Jutta", dans "Là-bas, tout près"

(...)

Sandra prend les mains de sa fille dans les siennes.

- Tu avais huit ans en 53. Tout allait bien pour nous. Mais il s’est passé quelque chose dans le pays. Un événement extraordinaire. On était le 17 juin. Des milliers d’ouvriers s’étaient rassemblés dans les rues. Ils réclamaient de meilleurs salaires, des conditions de vie décentes. Des pans entiers de la population les rejoignirent, qui exigeaient plus de liberté, la libération des prisonniers politiques, des élections libres. Georg était dans la rue, en tête de défilé. Le gouvernement était débordé, dépassé. Jamais un tel soulèvement n’avait eu lieu dans un pays communiste. Alors les chars sont arrivés, les chars soviétiques pour, comme disait Moscou, « venir en aide au pays frère ». La répression fut terrible, impitoyable. Beaucoup de camarades de Georg ont été exécutés, certains ont été jugés sommairement par des tribunaux soviétiques et déportés en Sibérie. Ton père a disparu, mais volontairement, car il n’avait qu’une idée en tête: qu’il n’arrive rien à sa fille, rien à sa femme. Pendant un an nous sommes toutes les deux restées sans nouvelles. Un de ses camarades est passé nous voir un jour pour nous laisser espérer qu’avec la mort de Staline, les choses allaient changer chez nous. Des associations de dissidents voyaient le jour. Tout le monde se savait surveillé, mais la vie reprenait son cours. Le retour de ton père fut le plus beau jour de notre vie.

- Mais maintenant, il ne craint plus rien, cela fait vingt-deux ans qu’il a participé à une manifestation…

- ...pas une manifestation Jutta, un soulèvement!

(...)

à lire dans « Là-bas, tout près » , recueil de nouvelles publié par les éditions Vérone, 75 Bd Haussmann 75008 Paris. 

08/10/2022

"Là-bas, tout près" éditions Vérone, recueil de nouvelles, extrait

 

 Tu es d’une étrange beauté. Je t’imagine en Athéna, casquée, armée, maîtresse de la ville et du monde. Mais tu n’es pas guerrière. Peut-être faudra-t-il que tu te venges ? Tu es Artémis, épuisée après la chasse Tes nymphes t’entourent, nues elles aussi dans cette caverne pour un repos bien mérité. L’une d’elles t’éponge le front, une autre revient de la source et verse sur ton corps un fil d’eau fraîche. Un bruit de pas. C’est l’autre, il passe sa tête et se régale. Il ne l’a pas cherché, il ne l’a pas voulu, mais il est là, Actéon. On entend ses chiens, au loin, qui gueulent de plaisir, ils dévorent le cerf. L’homme, chasseur ingénu est là sans le faire exprès. Un vieux réflexe, il se détourne.  

 Tu es encore plus belle quand tu admonestes tes enfants, le regard fier, les cheveux rejetés, tu es de la race des grandes. Elle fait un signe à ses nymphes encore horrifiées par l’intrusion de l’homme, elles reviennent auprès d’elle. Actéon s’immobilise. Ses vêtements se détachent et jonchent le sol. Il tombe en avant. Un fin duvet lui pousse sur tout le corps. Puis ce sont des poils. Sur la tête des cornes, deux en forme de dagues. Elles grandissent, son nez s’allonge en museau. Sur le crâne de grands andouillers s’épanouissent. Va maintenant, lui dit-elle. Va retrouver tes chiens. Il s’enfonce dans la forêt (...) 

21/09/2022

extrait de "Là-bas, tout près", recueil de nouvelles

 

(...)

 Le quartier est calme, la nuit bien noire. Il faut dire qu’à trois heures du matin… Jutta et son copain lorgnent sur cette petite maison coquette avec jardinet, bien repérable grâce à l’éolienne et aux nains qui montent la garde sur la pelouse. Un coup d’oeil sur la rue et le voisinage, le portail est vite enjambé. Ils s’approchent en évitant de piétiner les gravillons de l’allée trop bruyants, et après avoir testé les volets bien fermés, Andreas, fidèle à sa technique, crochète la serrure de la porte d’entrée. Pistolet en main, lampe de poche dans l’autre, Jutta passe la première. Ils pénètrent dans la cuisine, puis dans la salle de séjour, où trônent sur les étagères quelques objets sans intérêt, sans parler des livres derrière les vitrines de l’immense bibliothèque, bref rien d’extraordinaire. La lecture n’a jamais constitué pour Jutta son passe-temps favori. Tous deux cherchent autre chose.

- C’est toujours dans la chambre qu’on cache les bijoux!

Andreas:

- Mais s’il y a quelqu’un?

Jutta montre à son copain ce qu’elle a dans la main.

- Avec celui-là, ils ne vont pas broncher ! Attends-moi là, surveille à la porte, regarde si c’est OK dehors. (...)

 



...à lire dans « Là-bas, tout près » , recueil de nouvelles publié par les éditions Vérone, 75 Bd Haussmann 75008 Paris. Il est en vente en ligne par FNAC, Decître, Chapitre.com… ou dans votre librairie.