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20/04/2012

Si les civilisations se valent ?

 

 Les propos du ministre affirmant que toutes les civilisations ne se valent pas visaient les états musulmans, l’orient de façon générale. L’argument qu’on pourrait lui opposer est que le pire de tous les crimes a été commis en occident, au XX° siècle. Un crime commis contre des millions de femmes, d’hommes et d’enfants qui avaient le tort d’être nés. N’allons pas chercher ailleurs qu’en occident l’origine du nazisme. Le communisme aussi a son berceau en occident même s’il perpétua et perpétue toujours ses crimes jusqu’en Asie. Mais à moins de dire –ce que certains ont fait- que c’est l’âme allemande, l’âme russe qui sont criminelles et de plonger ainsi dans la xénophobie, on doit reconnaître que nazisme et communisme sont affaires de politique, de crise économique et politique, pas de civilisation. Une fois le nazisme vaincu et le communisme rejeté l’Allemagne renoua avec la démocratie et les libertés qu’elle avait connues avant les dictatures.(1) 

 Selon le dictionnaire, une civilisation est un « ensemble des phénomènes sociaux, religieux, intellectuels, artistiques, scientifiques et techniques propres à un peuple et transmis par l’éducation ». exemples : civilisations grecque, chinoise, occidentale. Civilisations précolombiennes. © Hachette Multimédia / Hachette Livre, 2001 

 Nazisme, fascisme ou communisme ne sont pas propres à tel ou tel peuple. Pas plus qu’il n’y a de tendance allemande au nazisme, il n’y a de prédisposition russe au communisme. Il n’y a pas de civilisation allemande ou russe, tout au plus des coutumes, et une multitude de façons de penser, de croire, de vivre. Et même dans le cas de la Russie où une religion l’emporte sur les autres, il est encore possible de ne pas y adhérer, de ne pas suivre ses recommandations. Et le pouvoir en place –si critiquable soit-il- n’est ni le représentant ni le chien de garde d’une idéologie. Mais là où depuis des siècles il est dans l’ordre des choses de couper la main d’un voleur ou de lapider une femme adultère, reconnaissez qu’il ne s’agit pas de la lubie ou du programme politique d’un fou ou d’un tyran de passage. C’est bien un fait de civilisation. 

 Mais attention ! Ce n’est pas bien de dire que les civilisations ne se valent pas, c’est incorrect politiquement. Pourtant, on admet facilement que les civilisations ne se valent pas toutes dans le temps. Est-il interdit de dire que la civilisation occidentale au vingt et unième siècle est plus respectueuse des droits humains que celle d’avant la révolution française ? Et même qu’elle lui est supérieure eu égard à la place qu’elle réserve aux femmes, au droit du travail, aux devoirs envers les enfants, à l’instruction publique, à l’exercice de toutes les libertés, sans parler de l’abolition de l’esclavage ? 

 Si les civilisations ne se valent pas dans le temps, pourquoi se vaudraient-elles dans l’espace ? Pourquoi serait-il interdit de dire qu’une civilisation du vingt et unième siècle qui ne respecte pas ses femmes, qui impose le mariage d’une jeune fille avec l’homme qui l’a violée, qui confond éducation et bourrage de crâne, qui prive son peuple des libertés, qui fouette, qui ampute, qui décapite, qui interdit tous les cultes sauf un, je ne vois vraiment pas pourquoi on s’interdirait de considérer cette civilisation comme inférieure, pire : condamnable. Et on nous parle de droit à la différence ? Mais de quels droits disposent les filles, les femmes, les chrétiens, les libres penseurs et les démocrates dans les états sous domination islamique, sinon celui de se taire ?  

 Car ces gens pour qui tout ce qui vient d’ailleurs est béni des dieux, qui s’indignent dès qu’on met en doute les « valeurs » d’une civilisation autre que la leur oublient que le mépris des droits humains se fait toujours au détriment des innocents. Nos angelots d’ici toujours prêts à bondir dès qu’on touche un cheveu d’un jeune délinquant auteur d’une agression à main armée font la sourde oreille quand sur un autre continent une femme portant un pantalon est condamnée à cinquante coups de fouet. Ils ont l’ouïe sélective, mais c’est un mal connu, et –pour rendre hommage à André Theuriet- depuis belle heurette dans mon pays. 

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(1) La sortie du totalitarisme communiste est plus laborieuse car le système qui est issu du mouvement ouvrier et se présente comme le porte drapeau des intérêts des travailleurs est plus pernicieux et imprègne plus les consciences. Bien que le régime ait tué ou déporté des millions d’individus et même de peuples, on peut encore se déclarer communiste dans nos démocraties sans encourir les poursuites qu’encourrait un nazi déclaré. Ce sera plus long, mais la Russie renouera avec la démocratie et les libertés.

  Ce sera plus long aussi car suite aux années de privation, l’irruption brutale du capitalisme contribue à la formation d’une société dans laquelle les individus n’ont d’autre but que l’enrichissement personnel, où rien n’importe plus que la consommation et la seule poursuite des biens matériels. Pour reprendre une idée de Jean Ferrat, les portes du jardin zoologique se sont ouvertes, mais c’est pour laisser en pleine jungle ces gens, libres mais désemparés. 

 

10/11/2009

Ils étaient le peuple, le vrai.

 Quand les manifestants clamaient « Wir sind das Volk », ils s'adressaient avec détermination, mais aussi avec ironie à ces canailles qui prétendaient jusque là parler et agir au nom du peuple. Depuis la fin de la guerre et les coups d'état communistes épaulés par l'armée soviétique dans les pays d'Europe centrale, en se présentant comme les représentants du peuple les castes dirigeantes protégeaient leurs privilèges et s'octroyaient tous les pouvoirs. D'ailleurs, les dissidents étaient dénoncés comme ennemis du peuple. Car -c'est écrit dans les Livres- les communistes ne peuvent compter d'ennemis que dans les rangs des capitalistes. Le peuple par définition ne peut être qu'unanime derrière les détenteurs de la Vérité, en d'autres termes les descendants de Marx, Engels, Lénine... (on s'arrête là, sinon, cela provoque des polémiques). Bon, il peut arriver qu'ici ou là on expédie -par erreur- un démocrate en Sibérie,  mais rien de grave, trente ans après, le parti fait son autocritique. Bref, depuis la guerre, parti dirigeant et peuple, c'était la même chose. Dictature ? Oui, mais du prolétariat... Ouf !

 

 De là la force de ce slogan  « Wir sind DAS Volk » , slogan qui est un livre à lui tout seul, un livre écrit avec le sang de ces gens qui, n'en pouvant plus de vivre enfermés, tentèrent de franchir l'enceinte de la prison.

 

 En quelques jours, il y a vingt ans, les canailles qui prétendaient jusque là parler et agir au nom du peuple rendaient les armes, et le mur s'effondrait.

 

 Hommage soit rendu à ces femmes et à ces hommes qui, bravant les forces de l'ordre -et quel ordre !- ont permis à des millions d'autres qui subissaient le totalitarisme de lui asséner le coup fatal, et d'accéder à la liberté et à la démocratie. Les allemands libérés, se réunissant avec ceux qui l'étaient déjà, pouvaient alors se reconnaître comme faisant partie du même peuple. Wir sind EIN Volk.

 

 Certes, il y a encore beaucoup à faire, on ne sort pas sans douleur d'un demi-siècle d'oppression, mais le plus dur a été accompli.

 

 

 

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