14/02/2011
Vacances en dictature
Un ministre prend des vacances dans un pays sous dictature. Pire : il aurait permis la livraison d’armes de répression au régime en question. Horrible. Oui c’est horrible de savoir que les deniers du peuple, donc de vous, de moi ont pu servir à contenir, pire à empêcher par la violence une révolution démocratique dans un pays quel qu’il soit.
C’est le rôle de l’opposition d’exiger une sanction. Mais parmi ceux qui réclament sa démission il y a des gens qui ont noué des liens et qui ont encore des rapports avec des régimes peu recommandables et qui font du commerce avec les pires dictatures que le monde connaît aujourd’hui. Et puis… il y a le passé.
Ces amitiés entretenues pendant des décennies avec les bons tyrans africains ou arabes, il s’agit bien de ministres, de gouvernants de ce pays, n’est-ce pas ? Tenez par exemple, le commerce avec l’Irak de Sadam Hussein ?
Parmi ceux qui réclament la démission de la personne en cause figurent des hommes et des femmes qui furent moins revendicatifs lorsque le secrétaire général d’un grand parti politique français fit l’éloge du paradis roumain retour de vacances au pays des Ceausescu.
Un autre secrétaire général devint ministre quelques années après un glorieux séjour à Moscou pendant la deuxième guerre, les militants de son parti risquaient leur vie et nombre d’entre eux la perdirent en se battant courageusement sur le sol français contre les nazis. Moscou, Staline, Thorez. Puis De Gaulle, Thorez ministre de la fonction publique de 1945 à 1947 et vice-président du conseil en 1947… Et allez !
Berlin 1936, les JO. Le sport, les bras levés devant les dieux du stade. Comme se tenait devant Hitler et Coubertin le grand meeting de la race pure, des milliers d’opposants au nazisme, sociaux-démocrates, communistes, juifs étaient persécutés, les camps ouvraient leurs portes. Mais l’important était de participer.
Et on s’effarouche aujourd’hui de voir un ministre emprunter l’avion d’un milliardaire pour passer ses vacances dans la Tunisie de Ben Ali ?
Oui c’est horrible. Encore plus d’apprendre que des armes étaient destinées aux milices d’un dictateur, des armes produites, financées par une démocratie. La nôtre. Attitude qui n’a donc rien à voir avec le pacifisme, ni avec un vague esprit de réconciliation. On sait que les dictateurs n’ont que faire des accords de paix. Ils savent, quand c’est leur intérêt, donner des gages d’amitié. Quand à faire des concessions, pas question. C’est toujours aux démocraties de se mettre au pas. Gardons tout de même le sens de la mesure. Le copinage avec les dictateurs ne date pas d’hier. On les accueille même sur notre sol. Rappelez-vous Duvalier, Jaruzelski, Hafez el Asad, Kadhafi, Khomeiny… Au chapitre du terrorisme d’état, Ben Ali tenait sa place. Admettons. Mais les hauts cris de l’opposition, je les entends depuis seulement huit jours.
Je ne suis pas fier du comportement de la France vis-à-vis des révolutions en cours, mais comment s’en étonner, quand on voit avec quelle indulgence nos politiciens de gauche comme de droite laissent proliférer sur leur propre sol les colporteurs des intégrismes les plus menaçants pour la démocratie et la république.
11:22 Publié dans Totalitarisme | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : dictateurs, dictature, tunisie, démocratie
Commentaires
Comme toujours, deux poids, deux mesures.
Le paradis roumain ? Je suis morte de rire. Ce qu'il ignorait le sécrétaire général, est le fait que , souvent, lorsque le temps n'était pas clément, on accrochait des pommes aux pommiers pour faire croire à une riche récolte. Hallucinant, je sais...
J'ai reçu une série de films en noir et blanc de la Roumanie d'autrefois, j'ai pensé te les envoyer par mail, tu aimerais peut-être...
Écrit par : Dana | 14/02/2011
Non, le secrétaire général du parti ne pouvait pas ignorer cela. Comment aurait-il pu ignorer les déportations de peuples entiers, les internements en hôpitaux psychiatriques, il n'ignorait pas non plus la répression sanglante des soulèvements ouvriers de Berlin en 1953, de Budapest en 1956, ni l'invasion de la Tchécoslovaquie en 1968. Les communistes français, rois incontestés du mensonge par omission, ont été les meilleurs ambassadeurs de cette immense prison qui s'étendait du rideau de fer à la Sibérie. Mais le coup des pommes accrochées aux pommiers, je ne connaissais pas, c'est la meilleure.
Pour les films, Dana, c'est sympa et c'est d'accord, mais pas maintenant, notre ordinateur commence à prendre de la bouteille, je le ménage, quand mon fils m'envoie une photo bourrée de Mo, je m'écarte tout en lui parlant doucement, je crains l'implosion. Je ne vais tout de même pas attendre l'augmentation prodigieuse de ma pension avec l'arrivée de la gauche au pouvoir en 2012! D'ici là je vais demander gentiment à Présario s'il accepterait que je lui branche un grand frère, dix queues dures de 500 gigaoctets.
Écrit par : pourny | 14/02/2011
Rires. Je me suis mal exprimée, au fait ce ne sont pas les films que je t'enverrais, mais un mail qui t'ouvrirait des liens vers British Pathé historical archive : )
Écrit par : Dana | 17/02/2011
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