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05/11/2025

Le pire à entendre : le bavardage de ceux qui se taisent.

 

 La couardise est l’état de celui ou de celle qui a la queue basse (du latin cauda, queue), qui est lâchement peureux. L’envie me vient de brocarder les gens qui, ne s’engageant jamais, se contentent d’observer le spectacle du monde. Ils étaient les défenseurs infatigables des droits de l’homme mais n’entendaient pas les appels de Budapest, de Prague, de Varsovie et de Moscou. Ils sont catholiques mais ne répondent pas aux appels des chrétiens d’Orient persécutés. Ils sont républicains, démocrates, éclairés, instruits et ne voient pas qu’une idéologie barbare est en train de conquérir leur pays.  Et ce, même quand l’insupportable vient effleurer leur existence.

 Ce n’est pourtant pas facile d’ignorer le malheur quand il inonde le petit écran, quand vous le croisez dans la rue, quand il frappe à votre porte. Difficile de fermer les yeux devant la détresse. Impossible de ne pas entendre les plaintes et les pleurs. Malgré tout, des millions de gens y parviennent. Pour cela tous les moyens sont bons. D’abord l’éloignement physique, dans les beaux quartiers, près des écoles où les enfants sont à l’abri de la mixité sociale –qu’on loue cependant dans les discussions entre amis. Le sport est aussi une élégante façon de contourner les problèmes, avec les parcours santé, les spas et autres soins ravissants pour le corps et pour l’esprit. Il y a aussi la culture, la « grande », celle qui s’étale sur France Inter et Télérama avec toute la délicatesse dont la bourgeoisie éclairée est capable dans son désir ardent d’éduquer le peuple. Comme cette ancienne directrice de France Inter qui souhaite élargir son audience à « ces gens qui n’ont pas un patrimoine culturel suffisant pour être en tranquillité avec ce monde. »

 Bien que disposant de tous les moyens d’information imaginables, téléphone collé à l’oreille et relié aux satellites, tous ces esprits très occupés ne savent pas tout car ils ne veulent pas tout savoir. Ils font les étonnés. Ah bon ? Tu es sûr ? Je n’ai pas eu l’info. Les pires sont ces hypocrites qui feignent la méfiance vis-à-vis d’une presse qu’ils jugent avide de scoops. Et quand après mille détours ils ont devant les yeux la pétition, ils la trouvent très pertinente mais n’ont pas de stylo sur eux.

 Ils ont l’art de sélectionner l’information, parfois même sans s’en rendre compte pour ne pas heurter leur bonne conscience. Et comme le mutisme est souvent en rapport avec la surdité, sourds, ils sont muets. Pourtant, ça papote dans les chaumières. Autour d’une table le dimanche, à Pâques ou à Noël, une quantité incroyable de révolutionnaires s’expriment avec conviction, vigueur et parfois même colère. Voilà le pire à entendre : le bavardage de ceux qui se taisent.

 On peut s’interroger sur les humains que nous sommes. Comment une telle indolence est-elle possible ? Comment l’expliquer sinon par la petitesse de l’âme, la pusillanimité ?

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03/11/2025

Ces gens au patrimoine culturel insuffisant

 

 

L’ancienne directrice de France Inter juge nécessaire de s’adresser à un public plus populaire, qu’elle définit ainsi :

« Ces gens qui n’ont pas un patrimoine culturel suffisant pour être en tranquillité avec ce monde. »

Moi pa avoir tout conprendu scadi la dam. Cé mieu come sa pasqe jê l’un precion qe sê pa jeanti pour tou lemonde.

 

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29/10/2025

Croire, est-ce encore possible aujourd’hui ?

 

 

 Bien que le christianisme soit souvent évoqué, le « Voyage de Jana » n’est pas un livre « chrétien ». Il n’y a que les humains qui peuvent l’être, chrétiens. Par contre, au cours du voyage de cette femme, la foi est omniprésente. Pas seulement parce qu’en Slovaquie beaucoup de gens sont croyants, mais surtout parce que sans la foi, j’entends : sans croire en quelque chose, la vie humaine est impensable, impossible.

 Je me rappelle cette question posée par une personne qui revenait de Grèce. Parlant des météores, ces falaises rocheuses occupées par des anachorètes, j’entendis cette boutade surprenante : « Mais qu’est-ce qu’ils vont faire là-haut ? ». Quoi répondre, sinon en prononçant ce petit mot de trois lettres qui exprime la fidélité à une idée, un principe, une vérité profondément ressentie ? On pourrait aussi s’étonner, en admirant les œuvres gigantesques que sont les cathédrales, comment les hommes ont pu à ce point défier les lois de la pesanteur et de l’équilibre, au prix de leur propre vie ? La foi, encore.

  S’étonner aussi que malgré les catastrophes qui nous ont frappés au cours des siècles, on ait pu encore et toujours croire en un Sauveur suprême…

 Mais si la foi peut faire grimper des hommes au sommet de montagnes, elle peut rendre aveugle et conduire à l’intolérance, à l’inquisition et au crime. D’ailleurs elle n’est pas que religieuse. Elle peut être politique. Comment des millions d’honnêtes gens ont pu croire pendant des années que la fin justifiait les moyens, que le Goulag était un passage obligé sur la voie d’une société nouvelle, juste et harmonieuse, s’ils n’avaient eu eux-mêmes foi en cette dernière ?

 Le mot « tolérance » est trop faible pour traduire les pensées de Jana. Elle ne tolère rien du tout. Elle écoute, questionne parfois, c’est tout. De quel droit pourrions-nous mépriser, punir ou tolérer, même seulement rire des pensées ou des croyances d’un autre ? Sommes-nous détenteurs de vérité ? En position de juger ? Idées et croyances ne sont jamais « tolérables », elles peuvent être contestables, parfois même à combattre, ou troublantes… comme la réponse de Mme Tomko à Jana qui lui demande :

- Croire, est-ce encore possible aujourd’hui ?

- Il nous a fallu des millions d'années pour former l'idée d’un dieu unique. Et en à peine 300 ans, nous avons cru nous en débarrasser. Tout cela est allé trop vite pour les humains que nous sommes. Et puis… nos frêles épaules pourront-elles indéfiniment supporter l’idée d’être seuls, maîtres de notre destin ?

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