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17/11/2010

Fatima, Pierre Emmanuel, Ange Gabrielle et Mourad

 

 J’ai été étonné d’apprendre que des jeunes en mal d’école, déscolarisés comme on dit, en un mot des délinquants, mais ce mot n’a plus cours, il faut dire : des jeunes vivant leur mal-être dans les quartiers défavorisés, j’ai donc été étonné d’apprendre que certains d’entre eux avaient été envoyés en Mayenne et en Bretagne pour une tentative de réinsertion scolaire. Apparemment l’expérience a mal tourné, je n’entre pas dans les détails, les gens du pays se sont plaint de leurs agissements. Il faut dire aussi que leurs camarades de classe, enfants de gens du cru, n’ont pas été tendres avec eux, se demandant ce que la racaille du 93 venait bien faire ici. Bref, outrages, insultes, échauffourées (1). 

 Quand je dis que j’ai été étonné, ce ne fut pas d’apprendre l’expérience elle-même somme toute louable. Qui refuserait que l’on donne une deuxième chance à des enfants dont les parents n’ont su faire qu’une chose : les mettre au monde ? Non, ce qui m’étonne, c’et que cette expérience a été tentée en province. Pourquoi envoyer ces enfants si loin ? D’abord cela coûte cher, mais il y a autre chose. 

 Sans mettre en doute la compétence des enseignants mayennais et bretons, il y a à quelques kilomètres du département 93 une cité détentrice de toutes les richesses matérielles certes, mais surtout spirituelles et morales : Paris. La capitale de la France compte elle aussi de très bons professeurs qui enseignent dans d’excellentes écoles, de très bons collèges et des lycées réputés. A tel point que les gens de la bonne société y placent leurs enfants. Et comme ces gens appartiennent souvent au monde politique, on sait à quel point ces personnes ont le sens de la fraternité, qui pourrait croire qu’elles n’accueillent pas favorablement l’idée que leurs filles et leurs fils s’acoquinent avec des jeunes vivant leur mal-être dans les quartiers défavorisés ?  

 Et là, loin du peuple intolérant, xénophobe et raciste de nos provinces, le « vivre ensemble » prendrait tout son sens, et qui sait ? Porte-drapeau de la diversité culturelle à la française, Fatima et Pierre Emmanuel apprendraient à se connaître, avant peut-être de s’engager pour la vie. Quant à Ange Gabrielle et Mourad, loin du tohu-bohu (2) des banlieues, enlacés à l’abri des grands arbres d’un jardin de Neuilly, ils choisiraient le prénom de leur premier bébé.  

                                                                    § 

(1) échauffourée n. f. Affrontement inopiné qui met aux prises de façon plus ou moins violente et confuse deux groupes d’adversaires. . MILIT Petit engagement de groupes isolés.  © Hachette Multimédia / Hachette Livre, 2001

(2) tohu-bohu [tyby] n. m. Confusion, désordre bruyant. La séance s’acheva dans le tohu-bohu. Des tohu-bohu(s).  © Hachette Multimédia / Hachette Livre, 2001 

  

14/11/2010

Une pensée pour les chrétiens d'Orient

 

 

 Depuis quelques jours ne cesse de trotter en moi cette devise (de Voltaire je crois) : je ne partage pas vos opinions, mais je ferai ce qui est en mon pouvoir pour que vous puissiez les exprimer.  

 Alors aujourd’hui, j’ai une pensée pour ces chrétiens d’orient persécutés pour être restés fidèles à leur croyance dans ces états où la charia islamique fait force de loi.  

 Ici en Europe, en Amérique aussi, les musulmans peuvent librement pratiquer leur culte. Et c’est très bien. Car la loi qui s’applique dans nos démocraties n’est dirigée contre quiconque, le laïcité garantit la liberté du culte. A condition toutefois que cette pratique reste limitée au domaine privé et n’oblige personne. 

 J’aimerais entendre plus souvent et plus fort la voix de ces musulmans qui chez nous pratiquent librement leur culte, j’aimerais les entendre condamner haut et fort les pratiques totalitaires criminelles de leurs coreligionnaires qui au Pakistan, en Irak et ailleurs ne supportent pas la présence de femmes et d’hommes adeptes d’autres confessions.

09/11/2010

Guillermo Farinas, pour la liberté de l'esprit

   

 C’était sa dernière grève de la faim, la vingt-troisième. Elle avait duré 135 jours. Guillermo Farinas se battait pour la libération des prisonniers politiques. Cette fois, ce ne fut pas une grève pour rien.

  « Le parlement européen a décerné jeudi son prix Sakharov « pour la liberté de l’esprit » au dissident cubain Guillermo Farinas. Ce journaliste indépendant âgé de 48 ans s’est signalé en entreprenant 23 grèves de la faim pour défendre les libertés publiques au sein d’un des derniers régimes communistes de la planète. » (Reuters, Desmond Boylan)

  Très affaibli, apprenant la nouvelle depuis sa maison de Santa Clara, Farinas, directeur de l’agence illégale Cubanacan Press a déclaré :  

« Le monde civilisé, le Parlement européen envoie un message aux dirigeants cubains qu’il est temps que Cuba connaisse la liberté de conscience et d’expression et la fin de la dictature.(…) Ce n’est pas un prix pour Guillermo Farinas, mais pour tout le peuple cubain, qui lutte depuis 50 ans pour sortir de cette dictature et dont nous, opposants pacifiques de l’intérieur, sommes la face la plus visible. »

  A Cuba, les réactions sont diverses, certaines confirment que le régime totalitaire n’est pas mort : des habitants du quartier accélèrent le pas pour se rendre à leur travail. « Je ne suis au courant de rien », lance l’un d’eux. (Reuters)

 D’autres saluent un homme digne qui a consacré sa vie pour la liberté des prisonniers et n’a jamais renoncé. Ainsi parle l’une des « Dames en blanc », femmes des prisonniers politiques cubains, récompensées par le prix Sakharov en 2005.

 Au parlement européen, le prix Sakharov(1) est décerné après débat et vote des députés. La seule opposition est venue d’une communiste française qui estime que ce fut là un choix politique : 

« Trois fois pour les Cubains depuis que le prix Sakharov existe, ça fait beaucoup ». 

Quoi d’étonnant dans cette réaction ? On sait que ni Cuba ni la Corée du nord ni la Chine n’ont le monopole du totalitarisme. On sait que ce dernier imprègne encore bien des cerveaux. D’ailleurs, s’il avait été chassé des esprits par chez nous, il y a fort à parier qu’il n’existerait plus là-bas. Car dans ces pays, les combattants courageux pour les libertés ne cessent de regarder dans notre direction, car ils savent que leur salut dépend de l’attitude des états démocratiques. 

  Ainsi, Guillermo Farinas s’est félicité de voir que « des gouvernements démocratiques et civilisés continuent de surveiller la situation des droits de l’homme à Cuba ». 

 Quand cette dame déclare que trois fois pour les Cubains ça fait beaucoup, chère madame, à qui la faute ? Au Parlement européen ? Aux députés de droite à l’origine de cette décision ? Et pourquoi pas aux dissidents cubains qui auraient le tort de trop faire parler d’eux ? Cette dame était probablement très jeune en août 1968 quand les troupes du Pacte de Varsovie entrèrent en Tchécoslovaquie pour mettre fin au Printemps de Prague. Ses pairs, qui avaient pourtant l’âge de raison, ici en France, n’avaient pas bougé le petit doigt. Quarante ans après, vingt ans après la chute du mur de Berlin, les communistes ont encore la ressource de justifier l’inacceptable, au nom de quoi ? Du dogme tout simplement. Enfermés dans la doctrine, ils ne peuvent pas se dédire, et comme à l’époque ils fermaient les yeux sur les crimes de Staline, et qualifiaient d’agents de la CIA ou d’hitléro-trotskistes ceux qui mettaient en doute la beauté du socialisme soviétique, aujourd’hui il leur reste encore des diables à désigner pour justifier leur aveuglement : l’Europe, l’Occident, le capitalisme, l’impérialisme américain. A force de crier au loup, les Français ne leur accordent plus leurs suffrages. Mais ne nous réjouissons pas trop vite, car à l’occasion d’une crise –peut-être à l’échelle du monde- surfant sur des colères populaires, ils pourraient bien reprendre du poil de la bête (immonde).  

 Car ces gens-là ont des alliés. J’attends que vous soyez bien assis. Vous y êtes ? 

 Au Parlement européen, en ce jour du 20 octobre 2010, sur la question de savoir si le journaliste cubain Guillermo Farinas méritait de se voir décerner le prix Sakharov,  

Les socialistes ne se sont pas exprimés.

Les socialistes n’ont pas applaudi l’annonce du nom du lauréat.

 

                                           Introït

 

Vous les seigneurs de la haine,

vous les nouveaux rapaces,

oligarques flambant neufs,

ordonnateurs de la dérision,

testamentaires aujourd’hui d’ancestrales vengeances ;

vous qui aux oreilles des peuples

faites exploser les obus de votre « justice sociale » ;

c’est vous, microphoniques menteurs,

autopotentats des pauvres,

autoproclamés capitaines prolétaires ;

vous, messies dissimulés,

hypocritement furibonds ;

vous, dispensateurs d’un miel annoncé ;

vous, techniciens de l’imposture ;

vous, techniciens de l’insulte ;

vous, techniciens de la mort…

qui nous avez appris cette langue que je parle. 

 

 Un poème d’Angel Cuadra, déjà opposant à la dictature de Batista avant 1959, il fut arrêté en 1967 pour activités politiques subversives contre la dictature castriste, et condamné à 15 ans de prison. Emigré aux Etats-Unis en 1985, il est professeur à l’université internationale de Floride à Miami.

(publié dans l’Anthologie de la poésie cubaine censurée, proposée par Zoé Valdés par les éditions Gallimard, avec la collaboration de la FNAC et de Reporters sans frontières) 

 

(1) Sakharov (Andreï Dimitrievitch) (Moscou, 1921 ­ id., 1989), physicien nucléaire soviétique, «père» de la bombe H. Défenseur des droits de l’homme en U.R.S.S., il créa en 1970 la section soviétique d’Amnesty International. Assigné à résidence à Gorki de 1980 à 1986, il fut élu député au Congrès du peuple en 1989, malgré l’opposition d’une partie de l’appareil communiste. P. Nobel de la paix 1975.

 © Hachette Multimédia / Hachette Livre, 2001