17/07/2024
Naufrage
Je vais sans doute choquer certains de mes lecteurs, mais on ne peut s’empêcher parfois de dire ce qu’on a sur le cœur. Voilà. Depuis quelques années, l’extrême gauche montre un visage qui n’a rien, absolument rien à voir avec ses origines, plus précisément avec les idées révolutionnaires. Qu’elle ait rompu avec les principes énoncés par ses maîtres à penser, ce n’est pas le plus grave. Penser et préparer la révolution suppose d’ailleurs qu’on refuse toute obéissance aux dogmes. Le problème est ailleurs et bien plus profond.
L’extrême gauche a rompu ses liens avec la classe ouvrière. Depuis plus d’un siècle et demi, cette dernière était la base, le pilier, la raison d’être de la pensée révolutionnaire. On ne pouvait concevoir le socialisme comme un sujet de conversation dans des salons où l’on cause, ni comme une opinion parmi d’autres : car il en allait du sort de l’humanité. De l’émancipation de la classe ouvrière, de son appropriation des moyens de production dépendaient l’avenir des peuples, le bonheur sur terre. Les premiers socialistes se sont efforcés sans relâche de défendre les revendications des travailleurs, de favoriser la création d’associations et de syndicats, sans jamais oublier que ce combat contribuait à créer et développer la conscience de classe, car rien ne pouvait être obtenu des capitalistes sans l’unité de ceux qui se battaient pour vivre. Unité dans l’atelier, dans l’usine, unité au niveau planétaire : Prolétaires de tous les pays unissez-vous !
Le mouvement ouvrier a connu des succès indéniables. Mais la progression des salaires, l’amélioration des conditions de travail, la sécurité sociale, les congés payés n’ont pu être obtenus qu’au prix de luttes, de grèves et de sacrifices, parfois jusqu’à la mort dans des affrontements avec les forces de l’ordre, ordre d’un monde injuste, inégalitaire aux mains d’une minorité d’hommes propriétaires de tout. Certains succès ont éveillé l’espoir de voir changer les choses. La révolution russe, qui coïncidait avec la fin de la guerre meurtrière de 1914-18 montra pour la première fois qu’un peuple résolu, organisé, pouvait tenter de mettre un terme à l’exploitation de l’homme par l’homme.
Comment aurait-on pu imaginer une suite aussi tragique ? Comment aurait-on pu prévoir que la classe ouvrière pour la première fois victorieuse allait porter au sommet de son état une bande de bureaucrates sans foi ni loi, n’ayant d’autre ambition que de se maintenir au pouvoir par des manipulations et la violence, en profitant de tous ses avantages, cela au prix de famines, de déportations et de millions de victimes, par l’instauration d’un système policier impitoyable ? Qui aurait imaginé cela au mois d’octobre 1917 ?
Même en 1989 quand tout a implosé, il y avait des gens pour y croire encore. Va-t-on leur reprocher quand on sait que pour beaucoup de travailleurs, militants, sympathisants communistes, socialistes et même sans partis, l’URSS et les « démocraties populaires » étaient annonciatrices d’un monde nouveau en construction, alliant progrès social et amitié entre les peuples ? La déception fut à la mesure de l’immense espoir que 1917 avait suscité. La chute du mur de Berlin et du rideau de fer plongea des millions de gens de gauche, ici en occident, dans le désarroi. Même les trotskistes qui avaient espéré une révolution politique et la fin du stalinisme ont dû reconnaître que les événements n’allaient pas dans le « bon » sens de l’Histoire. Dans les faits, le programme de la Quatrième internationale ne s’était pas vérifié. Et le plus insupportable pour la gauche tout entière fut de reconnaître la victoire du capitalisme.
Le mur est tombé. Comme ces maisons en construction d’où sortent des fers à béton rouillés et qui restent comme cela, abandonnées et tristes car on ne peut s’empêcher de penser qu’une famille en avait fait un projet pour la vie, et puis la vie en décida autrement, comme ces ruines qu’on rencontre dans des lieux déshérités, le communisme n’a pas été édifié. A-t-il seulement commencé à l’être ? Alors des millions de gens se frottent les yeux, se disent que tout est foutu. Beaucoup plus que cela : c’est leur combat, leur foi, leur vie qui s’écroulent. Non seulement il n’y a plus rien, mais on s’est trompé. Tout ça pour ça. Terrible. Peut-on avec des mots commenter la profondeur de leur désespoir ? Seul peut-être le théâtre pourrait le faire.
C’est d’ailleurs ce qui se passe aujourd’hui. Nos nostalgiques ont tout perdu, leurs illusions et la classe ouvrière. Désorientés, en pleine démocratie ils jouent aux antifascistes, s’inventent de nouveaux idéaux, renouent avec l’éternel antisémitisme. Dépourvus de toute base sociale, ils se cherchent un nouveau prolétariat dans les populations issues de l’immigration, et là…ils rencontrent le pire ennemi de la classe ouvrière : le fondamentalisme religieux. Mais ce qu’ils semblent ignorer, c’est que si ce dernier l’emporte un jour, il ne fera de cadeau à personne, même à la gauche.
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11:55 Publié dans Autour d'un mot | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : extrême gauche, nostalgie
06/05/2024
Islamophobie
Je ne comprends pas la tolérance dont font preuve les politiques et les médias à l’égard des intégristes religieux. Ces illuminés qui prennent à la lettre les textes « sacrés » sont des gens dangereux, des ennemis du genre humain. Convertir ou éliminer, voilà toute la sainteté de leur guerre. C’est pourquoi je ne partage pas ce mot d’un ancien président de la république :
« L’islamophobie est condamnable, c’est du racisme ».
Et alors ? L’islam n’est pas une race. L’islam n’est pas une nation. L’islam n’est pas un peuple. La peur de l’étranger est irrationnelle et dangereuse et conduit au racisme. Mais craindre des préceptes, des dogmes, des pratiques inégalitaires, violentes, guerrières est une attitude tout à fait compréhensible. On peut nouer des liens d’amitié avec des étrangers et craindre le fanatisme. A l’inverse, il peut arriver que les pratiquants d’une religion soient xénophobes. On peut être athée et aimer l’humanité. On peut être islamophobe et fréquenter des amis asiatiques, iraniens, indiens, arabes, kabyles, français, blancs, noirs, jaunes, rouges, africains, asiatiques, américains du nord et du sud, européens. On peut être anticlérical et fréquenter les mêmes.
Je revendique le droit d’afficher, de manifester mon islamophobie. Pour moi, il n’y a pas de pays catholiques, protestants, bouddhistes, musulmans, animistes, orthodoxes… D’abord, un pays, ça ne sait pas lire, ça ne prie pas, ça ne défile pas derrière des idoles, ça ne voile pas les femmes, ça ne s’enchaîne pas aux grilles des cliniques où l’on pratique l’avortement. Pour moi, il n’y a pas plus de peuple catholique, protestant… D’ailleurs, les gens sont si différents, que je me demande encore ce qu’est un pays, ce qu’est un peuple. On peut se sentir plus proche d’un étranger dont la langue nous est incompréhensible que d’un voisin de palier français de souche. Et inversement.
Les religions exploitent à fond l’ignorance… allez disons le mot : la bêtise humaine. Le problème avec cette dernière, c’est qu’elle n’a pas de couleur de peau, elle n’a pas non plus de frontière. Malheureusement, car si la bêtise avait sa nation, son état, son peuple, on pourrait la montrer du doigt et rigoler un bon coup. Mais elle se répand, et apparaît quelquefois là où on l’attend le moins, chez des gens très instruits par exemple, cultivés même, et tout près de chez nous. Ces gens s’en prennent à qui ?
Alors qu’un professeur a été tué pour avoir montré des caricatures de Mahomet à ses élèves, des gens instruits, informés, cultivés qui parlent dans la radio s’en prennent à qui ? A la violence ! Les mêmes passent en cortège et prônent l’apaisement dans des marches « blanches ». L’église pourtant meurtrie appelle aussi à la paix, prière en plus. Autant d’attitudes lâches de gens qui ne veulent pas voir, qui ne veulent pas nommer l’ennemi. Et quand par pur hasard, par inadvertance celui-ci est nommé sur un plateau de télé, c’est aussitôt pour le dédouaner en invoquant la misère dans les quartiers, le chômage, l’impuissance des parents, le manque d’éducation, le manque de moyens pour l’école, la disparition des services publics. Bref le coupable, c’est le capitalisme, l’occident colonisateur et raciste qui se croit dispensateur des lumières mais qui en réalité voudrait imposer ses lois au reste du monde. Pour cette idéologie du renoncement, les victimes réelles ne sont pas loin d’être les auteurs des attentats.
On assiste à une sombre manipulation, selon le procédé du « Turnspeech » cher aux négationnistes : « La Shoah réelle, c’est celle qui se déroule sous nos yeux dans les territoires palestiniens sous la botte israélienne ».
Jusqu’où faudra-t-il aller dans l’horreur pour voir nos intellectuels de gauche –une certaine gauche- désigner l’ennemi et le combattre ? J’ai peu d’espoir. On sait à quel point la chute du communisme pour eux a été d’autant plus dure qu’elle signifiait du même coup la victoire du Satan capitaliste. Si maintenant on leur enlève l’électorat qui les écoute encore, ces jeunes et moins jeunes des quartiers déjà bien islamisés, ce prolétariat de substitution, que leur restera-t-il ?
Mais peut-être avons-nous d’autres ressources, des gens qui, sans parler dans le poste, feront leur travail d’explication, n’hésiteront pas à affronter les sujets qui font des vagues, bref des gens courageux qui sauront ne pas fermer les yeux devant l’évidence. Regardez Samuel Paty.
10:28 Publié dans Autour d'un mot | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : islam, islamophobie, racisme
23/12/2023
Je souhaite un joyeux Noël à mes fidèles lecteurs!
n
no
non
nooon
non na !
non, mais
non de non
nom de dieu
non nein niet
non à l’Europe
non au nucléaire
non aux tests ADN
non aux expulsions
non au déficit public
non à la taxe carbone
non aux privatisations
non aux licenciements
non au tout sécuritaire
non aux délits d’initiés
non aux discriminations
non aux plans de relance
non au service minimum
non aux parachutes dorés
non au traité de Lisbonne
non aux inégalités sociales
non au dopage dans le sport
non aux magnats de la presse
non aux suppressions de postes
non aux caméras de surveillance
non à la baisse du pouvoir d’achat
non à la privatisation des universités
non aux délocalisations des entreprises
non au démantèlement des services publics
non au non remboursement des médicaments
non aux directives de la commission européenne
non au rejet de gaz toxiques à proximité des écoles
non à l’installation des éoliennes dans nos campagnes
non à la suppression programmée des hôpitaux de proximité
non à la suppression de la taxe professionnelle utile à nos communes
non à l’armée
non à la guerre
non à la disparition des casernes dans nos provinces
non au chômage technique et aux licenciements dans nos usines d’armement
Femmes et hommes politiques d’opposition ! Comment voulez-vous qu’on vous croie sur parole ? Vous ne savez dire qu’un mot :
« NON ».
Comme il suivait chaque année le Tour de France, Jean Amadou était amusé par l’omniprésence des manifestations contre ceci, contre cela au bord des routes. On peut comprendre cette façon d’exposer des revendications, sachant que les caméras de télé sont là pour les faire connaître à un nombreux public. Non au passage du TGV, non à l’autoroute, non à la baisse du prix du lait, etc. Un jour –c’est Amadou qui rapporte- sur une banderole je n’ai vu qu’un mot :
« NON ».
Certes il y a des refus nécessaires. Bien que certains, criés et brandis sur calicots un jour et son lendemain par les mêmes personnes… ne soient pas toujours conciliables. Mais s’il n’y a que des refus, les gens se lassent et ne voient pas le bout du tunnel. Y a-t-il seulement de la lumière au bout du tunnel ? Une perspective, un projet ? Allez, soyons fou : une vision du monde ?
10:50 Publié dans Autour d'un mot | Lien permanent | Commentaires (0)