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23/10/2020

Cauchemar

 

 


 Quand je fais mes courses et que je croise une dame de noir vêtue des pieds à la tête, visage dissimulé derrière un grillage, je me dis que nous avançons à reculons, que les esprits éclairés de ce nouveau siècle, que les jeunes, les enseignants, bref les humains qui devraient hisser le drapeau de la liberté, n’ont pas pris la mesure de la situation dans laquelle risquent de se trouver nos enfants et petits-enfants : un monde dans lequel un maître encagoulé muni d’une cravache lancera une fatwa contre Darwin, Voltaire, les femmes, les homosexuels, les a-sociaux, pourquoi pas les juifs et les gens du voyage.

 Je fais un cauchemar : un monde dans lequel mes petites filles –voilées- n’iraient plus à l’école où seuls les petits garçons écouteraient en silence un « enseignant » de sexe masculin leur affirmer que l’Homme est apparu il y a quatre mille ans, sa « compagne » quelques jours plus tard. Non, cela n’arrivera pas, car je suis bien certain que vous, qui lisez ces lignes, qui les trouvez exagérées, dictées par un esprit tourmenté qui voit le mal partout, vous qui voyez encore dans une idée totalitaire venue d’ailleurs une chance pour la France, je suis bien certain que vous, guerrier infatigable de la gauche et de la liberté, vous allez faire tout votre possible pour qu’un tel cauchemar ne se traduise pas dans les faits. Quel beau combat vous allez mener !


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19:17 Publié dans Autour d'un mot | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gauche, islam

08/10/2020

Bonne conscience

 On critique beaucoup l’extrême droite. Ce qu’on oublie de dire, c’est qu’elle accorde à peu de frais une bonne conscience à nombre de ses détracteurs. A peu de frais, car il suffit d’apparaître quelques minutes sur les pavés de Paris, d’élever la voix autour d’une table ou de cliquer au bas d’une pétition pour se donner des airs de combattant anti-fasciste.

 On réside à vingt lieues des zones de non droit, mais on clame autour du barbecue que tout le monde est très gentil, ou presque. Les femmes et les honnêtes gens se verraient interdire l’accès dans les commerces, les cafés et les quartiers qu’on les tiendrait pour menteurs ou identitaires.

 Bon, critiquer l’extrême droite est bon pour le moral du bourgeois tranquille dans son jardin. Il ne croit que ce qu’il voit, et comme il est loin de tout, à cent lieues du chômage, de la misère, de la détresse et de l’injustice, il est un révolté contenu, un insurgé rentré. S’il lui arrive d’être extrême, c’est dans la modération. Ses virulences sont rares mais démonstratives. Au-delà des idées, des convictions, plus forte que toutes les indignations, la bonne conscience écrase tout sur son passage à commencer par la conscience.

 Le fachophobe d’aujourd’hui est à l’anti-fasciste réel ce que le héros de Cervantès est au combattant anti-franquiste de 1936.


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29/08/2020

Esclavage

 

 On sait qui étaient les colonisateurs et les marchands d’esclaves. On le sait. Mais il n’est pas toujours conseillé de le rappeler. Pour plus de détails, il vous faudra quitter la France, et vous rendre au Musée international de l’esclavage. Une exception qui confirme la règle : les Britanniques ne craignent pas de regarder leur passé en face. Le commerce des esclaves faisait escale à Bordeaux, à Nantes et dans ce port du nord de l’Europe : Liverpool. Un grand musée inauguré par l’UNESCO. La traite des noirs, la traversée de l’océan enchaînés dans des cales sombres et humides, la faim, les coups. Tout est dit. S’il fallait juger les auteurs de ce crime, il y en aurait du monde au prétoire ! Les marchands d’esclaves étaient européens, portugais, anglais, espagnols, français, américains du nord et du sud, et …africains. Les petits et grands potentats locaux échangeaient leurs frères de sang contre des armes et autres marchandises de première nécessité. Les uns n’auraient pas existé sans les autres.

 En outre, il faut s’entendre sur l’époque et la région concernées. Prenez la Bible, vous verrez qu’au Proche-Orient, le péché mignon de l’esclavage était l’affaire de gens très bien. Quand à nos Grecs « classiques » leur génie inventif n’a pas mis fin à ce fléau, fort bien justifié par le grand philosophe Aristote :

« Il est donc manifeste qu’il y a des cas où par nature certains hommes sont libres et d’autres esclaves, et que pour ces derniers demeurer dans l’esclavage est à la fois bienfaisant et juste. » (1)

Deux mille trois cent ans après, Engels examine l’esclavage antique :

« Etant donné les antécédents historiques du monde antique, spécialement du monde grec, la marche progressive à une société fondée sur des oppositions de classes ne pouvait s’accomplir que sous la forme de l’esclavage. Même pour les esclaves, cela fut un progrès ; les prisonniers de guerre parmi lesquels se recrutait la masse des esclaves, conservaient du moins la vie maintenant, tandis qu’auparavant on les massacrait et plus anciennement encore, on les mettait à rôtir. » (2)

 Selon le vieil adage « ni rire ni pleurer mais comprendre », le marxisme ne justifie ni ne condamne. Explication froide, examen de laboratoire : l’esclavage était nécessaire. Des mots qui font peur, sortis de l’éprouvette. Eprouvant. (3)

 Le Coran nous en raconte de bien belles aussi sur le sujet.

 Au cours de notre longue histoire, des millions de gens ont su exploiter des millions d’autres, prisonniers, métèques, étrangers, femmes, enfants, millions d’autres qui n’avaient d’autres moyens de survie que leurs jambes pour courir ou leurs bras pour ramer. Quand à la Renaissance, période des grandes découvertes, elle fut celle aussi de la confrontation avec ces êtres sans âmes, auteurs et victimes de sacrifices humains pour qui la soumission au « bon chrétien » fut probablement vécue comme une libération …

 Marchands d’un côté, esclaves de l’autre, arrêtez ! L’affaire est plus compliquée. Elle concerne aussi ceux qui n’ont rien acheté, rien vendu, rien dit. Elle concerne aussi nos pères en l’honneur de qui on pourrait ouvrir un grand musée sur le bon port de Nantes, gratuit, ouvert à tous, avec de grands panneaux explicatifs et des dépliants traduits dans toutes les langues, un musée qu’on pourrait jumeler avec celui que les souverains africains édifieraient sur cette petite île au large de Dakar, que des Hollandais achetèrent aux autochtones et qu’ils baptisèrent du joli nom de « Goede Reede » (La Bonne Rade), petit paradis des commerçants d’esclaves jusqu’au début du XIX° siècle.

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(1) La Politique, Librairie philosophique J.Vrin, 1977, 1255a


(2) Anti-Dühring (M.E.Dühring bouleverse la science) Editions sociales, Paris, 1963, pp. 213-214


(3) A la décharge du « matérialisme historique », disons qu’il n’a pas le monopole des analyses froides de laboratoire. Jeune diplômé(e) sans emploi, employé(e) de cinquante ans licencié(e), chômeur(se) de longue durée, vous devez mal accepter les propos de ces analystes en chambre (froide) entendus sur les radios chaque matin : « Bien sûr la crise aura des conséquences, et bien évidemment en premier lieu il faut s’attendre à une montée en flèche du chômage… » C’est comme si c’était fait. On n’y peut rien. Il fallait s’y attendre. C’est la loi, la règle, le cours des choses, pourquoi pas la coutume ? C’est écrit. Le destin, la fatalité. Le sort en est jeté, il faudra nous y faire. En plus, il se croit honnête ce chroniqueur, c’est cela le plus révoltant : ce qu’il dit est vrai, tout le monde le sait. Lui le dit et l’explique en noir et en noir encore. Pour les couleurs, il nous faudra attendre la bonne volonté des dieux : un sourire de Wall Street, un bon geste des producteurs d’or noir, un OVNI gigantesque débarquant sur la Terre une montagne de réserves alimentaires (surtout des fruits et des légumes verts).