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10/11/2018

Deux hommes, un allemand, un français

 


Déclaration de Karl Liebknecht au Reichstag, 02 décembre 1914:

 

"Une paix rapide et qui n'humilie personne, une paix sans conquêtes, voilà ce qu'il faut exiger. Tous les efforts dirigés dans ce sens doivent être bien accueillis. Seule, l'affirmation continue et simultanée de cette volonté, dans tous les pays belligérants, pourra arrêter le sanglant massacre avant l'épuisement complet de tous les peuples intéressés. (...)


 J'approuve également tout ce qui est fait en faveur du sort Si rude de nos frères sur les champs de bataille, en faveur des blessés et des malades pour lesquels j'éprouve la plus ardente compassion. Dans ce domaine encore, rien de ce que l'on pourra demander ne sera de trop à mes yeux.


 Mais ma protestation va a la guerre, à ceux qui en sont responsables, à ceux qui la dirigent; elle va à la politique capitaliste qui lui donna naissance; elle est dirigée contre les fins capitalistes qu'elle poursuit, contre les plans d'annexion, contre la violation de la neutralité de la Belgique et du Luxembourg, contre la dictature militaire, contre l'oubli complet des devoirs sociaux et politiques dont se rendent coupables, aujourd'hui encore, le gouvernement et les classes dominantes."

 

Discours de Jean Jaurès le 25 juillet 1914:

 

"La politique coloniale de la France, la politique sournoise de la Russie et la volonté brutale de l’Autriche ont contribué à créer l’état de choses horrible où nous sommes. L’Europe se débat comme dans un cauchemar.


 Eh bien ! citoyens, dans l’obscurité qui nous environne, dans l’incertitude profonde où nous sommes de ce que sera demain, je ne veux prononcer aucune parole téméraire, j’espère encore malgré tout qu’en raison même de l’énormité du désastre dont nous sommes menacés, à la dernière minute, les gouvernements se ressaisiront et que nous n’aurons pas à frémir d’horreur à la pensée du cataclysme qu’entraînerait aujourd’hui pour les hommes une guerre européenne.


 Vous avez vu la guerre des Balkans ; une armée presque entière a succombé soit sur le champ de bataille, soit dans les lits d’hôpitaux, une armée est partie à un chiffre de trois cent mille hommes, elle laisse dans la terre des champs de bataille, dans les fossés des chemins ou dans les lits d’hôpitaux infectés par le typhus cent mille hommes sur trois cent mille.


 Songez à ce que serait le désastre pour l’Europe : ce ne serait plus, comme dans les Balkans, une armée de trois cent mille hommes, mais quatre, cinq et six armées de deux millions d’hommes. Quel massacre, quelles ruines, quelle barbarie ! Et voilà pourquoi, quand la nuée de l’orage est déjà sur nous, voilà pourquoi je veux espérer encore que le crime ne sera pas consommé.


 (...) s’il nous reste quelques heures, nous redoublerons d’efforts pour prévenir la catastrophe. Déjà, dans le Vorwaerts, nos camarades socialistes d’Allemagne s’élèvent avec indignation contre la note de l’Autriche..."

05/12/2016

Angel Cuadra, poète

 


Vous les seigneurs de la haine,
vous les nouveaux rapaces,
oligarques flambant neufs,
ordonnateurs de la dérision,
testamentaires aujourd'hui d'ancestrales vengeances;
vous qui, aux oreilles des peuples
faites exploser les obus de votre "justice sociale";
c'est vous, microphoniques menteurs,
autopotentats des pauvres, autoproclamés capitaines prolétaires;
vous, messies dissimulés,
hypocritement furibonds;
vous, dispensateurs d'un miel annoncé;
vous, techniciens de l'imposture;
vous, techniciens de l'insulte;
vous, techniciens de la mort...
qui nous avez appris cette langue que je parle.

 

Déjà opposant à la dictature de Batista avant 1959, Angel Cuadra fut arrêté en 1967 pour activités politiques subversives contre la dictature castriste, et condamné à quinze ans de prison. Président du Pen Club des écrivains cubains en exil, en mars 1981 Amnesty international l'a sélectionné comme le "prisonnier de conscience" du mois.

Ce poème est extrait de l'Anthologie de la poésie cubaine censurée proposée par Zoé Valdés publiée par Reporters sans frontières, la FNAC et les éditions Gallimard

05/05/2015

A mes camarades de classe des années 60...

 

 ...quand les Lumières éclairaient encore.

Après l'enseignement du grec ancien et du latin, qu'y a-t-il encore à supprimer parmi ces matières qui encombrent l'esprit de nos enfants ? Pour éviter la table rase, à l'heure où même les pacifistes ne s'opposent pas à la propagation des avions de guerre Rafale dans les états en guerre, il faudrait les réveiller un peu. Insister dans nos classes sur les crimes des armées coloniales, les répressions sanglantes des populations africaines, ces sujets rencontrent un certain succès parmi les élèves issus de ces contrées. Pour ajouter à leur plaisir, on se dispensera d'aborder le fait religieux en général, car on sait maintenant qu'il n'y a qu'un fait en matière de religion: le musulman. On évitera les sujets qui fâchent, les crimes contre l'humanité, les tortures et l'esclavage quand ils sont l'oeuvre d'états africains ou orientaux, les crimes contre l'humanité quand il s'agit de la Shoah ou du génocide arménien, mais surtout, surtout, alors là j'insiste. NE PAS ABORDER DE QUELQUE FACON QUE CE SOIT LA LECTURE DES OEUVRES DES PHILOSOPHES DU SIECLE DES LUMIERES au risque de jeter le trouble dans les esprits et de mettre en cause la belle idée du Vivre ensemble. 

Retirez donc des bibliothèques, loin du regard de nos enfants ces brûlots des encyclopédistes, paroles génératrices de haine des mécréants Diderot, Bayle, Voltaire : 

"...le meilleur remède contre le fanatisme et la superstition serait de s'en tenir à une religion qui, prescrivant au coeur une morale pure, ne commanderait point à l'esprit une créance aveugle des dogmes qu'il ne comprend pas..." (Diderot, article Christianisme de l'Encyclopédie) 

"C'est en revêtant cet extérieur imposant, c'est en tombant dans ces convulsions surprenantes, regardées par le peuple comme l'effet d'un pouvoir surnaturel, c'est en lui présentant l'appas d'un songe ridicule que l'imposteur de La Mecque osa tenter la foi des crédules humains, et qu'il éblouit les esprits qu'il avait su charmer, en excitant leur admiration et captivant leur confiance." (Diderot, article Christianisme de l'Encyclopédie) 

"...l'ignorance d'un premier Etre Créateur et Conservateur du Monde n'empêcherait pas les membres de cette Société (une société d'athées) d'être sensibles à la gloire et au mépris, à la récompense et à la peine, et à toutes les passions qui se voient dans les autres hommes, et n'étoufferait pas toutes les lumières de la raison, on verrait parmi eux des gens qui auraient de la bonne foi dans le commerce (les relations sociales), qui assisteraient les pauvres, qui s'opposeraient à l'injustice, qui mépriseraient les injures, qui renonceraient aux voluptés du corps, qui ne feraient tort à personne... Il s'y ferait des crimes de toutes les espèces, je n'en doute point; mais il ne s'y ferait pas plus que dans les sectes idolâtres..." (Pierre Bayle, Pensées sur la comète) 

"Comparez un peu les manières de plusieurs Nations qui professent le christianisme,...vous verrez que ce qui passe pour malhonnête dans un pays ne l'est point du tout ailleurs. Il faut donc que les idées d'honnêteté qui sont parmi les chrétiens ne viennent pas de la religion qu'ils professent...Avouons donc qu'il y a des idées d'honneur parmi les hommes qui sont un pur ouvrage de la Nature, c'est-à-dire de la Providence générale." (Pierre Bayle, Pensées sur la comète) 

"Je voyais arriver à droite et à gauche des troupes de fakirs, de talapoins (moines siamois), de bonzes, de moines blancs, noirs et gris, qui s'étaient tous imaginé que, pour faire leur cour à l'Etre Suprême, il fallait ou chanter, ou se fouetter, ou marcher tout nu. J'entendis une voix terrible qui leur demanda: Quel bien avez-vous fait aux hommes ? A cette voix succéda un morne silence; aucun n'osa répondre, et ils furent tous conduits aux Petites-Maisons (asiles de fous) de l'univers: c'est un des plus grands bâtiments qu'on puisse imaginer." (Voltaire, article Dogmes de l'Encyclopédie) 

 Il suffit pour lire ces belles pages d'ouvrir le Lagarde et Michard, recueil de textes des penseurs du XVIII° siècle, philosophes qui nous ont appris le rire, rire de la bêtise, de l'obscurantisme, de toutes les formes d'absolutisme. Nos professeurs nous les ont fait découvrir et aimer. Nous avons eu cette chance, comme l'ont eue les personnes qui aujourd'hui décident des programmes d'enseignement. Souhaitent-elles que leurs propres enfants soient dispensés de cet éclairage ? Ce serait un signe inquiétant que l'enseignement des Lumières ne tienne plus la place que l'école de la République lui avait accordée.

 

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