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04/12/2022

Le pacifisme fait feu (de tout bois)

 

 Quoi de plus naturel que de s’insurger contre la guerre? Il n’y a qu’à regarder les images terribles qui nous parviennent d’Ukraine. Quoi de plus révoltant que d’entendre ces va t’en guerre qui, de leur fauteuil, jouent les stratèges, comme s’ils étaient sur le front?

 Mais le plus étonnant, c’est d’entendre: A bas la guerre! Comme si la guerre était une idée générale, un concept insensé, hors du temps et de l’espace, une sorte d’incarnation du mal. Les militants pacifistes qui crient “A bas la guerre”, je les connais depuis longtemps.

 Ils n’étaient pas contre la guerre d’Algérie, puisqu’ils soutenaient le combat du FLN. Ils étaient les premiers à soutenir la lutte du peuple vietnamien pour son indépendance contre l’impérialisme américain. Dans l’affaire des Maldives (Falkland) ils avaient rapidement choisi leur camp, aux côtés des colonels argentins contre le Royaume-Uni. En 1944 ils étaient probablement du côté du maréchal Pétain, dans un Etat français pacifié, avant que les affreux va t’en guerre anglo-saxons n’envahissent nos plages et mettent le feu à l’Europe!

 Pendant et après la révolution de 1917, ils auraient probablement refusé d’armer les ouvriers et les paysans russes qui tentaient de vaincre les armées blanches contre-révolutionnaires. 24 ans plus tard, quand la Wehrmacht était aux portes de Moscou, ils auraient sans doute conseillé au pouvoir soviétique de poser les armes et de capituler afin d’éviter les combats sanglants qui ravagèrent l’Europe jusqu’à Berlin.

 Il faut se méfier des va t’en paix qui sont pacifistes quand la guerre ne va pas dans le sens qu’ils voudraient. Pour en revenir à l’Ukraine, jamais ils ne parlent d’une guerre de libération. Et pourtant c’est bien le cas. Libération d’un pays qui subit les bombardements d’un envahisseur qui viole toutes les règles internationales.

 J’ajouterai ceci: la cause profonde de leur condamnation de la guerre est qu’ils croient encore au diable. Et leur Satan, c’est l’OTAN, l’Amérique, le capitalisme, l’Europe, l’Occident et, et, et...la démocratie?

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09/09/2013

Rage rentrée

 

 La paix. On veut la paix. Qu’on nous fiche la paix. Que pouvons-nous souhaiter d’autre que la paix ? Quand on sait ce que la guerre coûte en souffrance et en vies humaines. Toutefois, chaque fois qu’une crise, un conflit se déclenche dans le monde, ou pire quand un peuple n’en peut plus de vivre sous le joug d’une dictature sanglante, il est normal que les humains que nous sommes se posent la question de faire cesser le mal. Mais comment ? Par le dialogue ? Mais avec qui ? Il y a encore des démocraties qui perpétuent le crime, avec celles-ci le dialogue reste possible, d’ailleurs elles ont signé des chartes ou des déclarations qui interdisent de porter atteinte aux droits de l’homme, on peut donc en insistant un peu leur faire appliquer le droit. Mais les dictateurs, les dictatures, les régimes totalitaires pour lesquels rien ne vaut qu’un goût immodéré pour le pouvoir total ? Aller parlementer avec ces gens-là ? 

 Le pacifisme est une idée formidable, inséparable de celle de démocratie, de celle des droits humains. Une idée qui prend sa source au siècle des Lumières quand pour la première fois on a pensé en termes universels, quand la maxime de notre action devait pouvoir être érigée en règle. La grande idée c’était : le bonheur pour tous. Et la première condition du bonheur, c’est la sécurité, l’assurance que les hommes les femmes et les enfants pourront vivre et s’épanouir dans une société régie non par la force, mais par le droit. La paix n’est qu’une condition, mais c’est la porte ouverte au bonheur des hommes. 

 Quand il arrive qu’un fou, un tyran, un clan, un fanatique passant outre l’intérêt général, bafouant les lois et les droits de son peuple s’empare du pouvoir et devient une menace pour la vie de millions d’êtres humains, que doit-on faire ? La question s’est posée mille fois sans doute dans l’histoire, et si l’on ne retient que les événements du XX° siècle, peut-être cent fois. Mais si les choses le plus souvent sont restées ainsi, ce n’est pas grâce à l’action du pacifisme, mais simplement parce qu’on a eu peur d’aggraver les choses. On ne peut pas dire que ce fut une honte d’avoir laissé Staline déporter, assassiner, emprisonner des millions de gens. Qu’aurait-il fallu faire ? Rien. Et c’est ce qui se passa. Même quand, après la mort du dictateur, les troupes de ce pays envahirent d’autres pays quand des peuples entiers luttaient pour leur liberté. Rien n’avait été fait non plus quand les dictateurs allemands et italiens s’en prirent à leur opposition, puis aux minorités, puis à l’Europe entière. Si rien ne fut fait ce n’est pas par pacifisme, mais par peur ou par aveuglement, car on sait que nous avons une capacité inouïe de ne pas voir ce que nous ne voulons pas voir. 

 Par contre, un des plus beaux gestes de ce terrible XX° siècle reste celui d’un pacifiste, un vrai celui-là : Jean Jaurès. Il le paya de sa vie. Du côté allemand, un autre eut autant de courage : Karl Liebknecht. Tous deux, l’un en France, l’autre en Allemagne appelèrent leurs députés à ne pas voter les crédits de guerre. Ce fut un échec, la guerre se déclencha avec les conséquences que l’on sait, et pas seulement par ses victimes, mais aussi car la fin de celle-ci loin d’être la paix provoqua une crise qui mena à la seconde guerre mondiale. Mais il serait faux de reprocher l’impuissance de ceux qui en 1914 ont combattu pour stopper la folie guerrière. Ils ont échoué car la propagande attisant les sentiments xénophobes et nationaux a pris le dessus sur la raison. L’ennemi était trop fort, un ennemi qui n’était ni français ni allemand, mais la rapacité de quelques-uns, producteurs de canons. 

 S’il était la seule voie possible en 1914, le pacifisme n’a pas valeur universelle. Je demanderais au militant communiste aujourd’hui pacifiste, s’il est vrai qu’il y a de bonnes guerres et d’autres mauvaises, s’il fallait militer pour la paix en Russie dans les années 17 et suivantes quand les armées blanches menaçaient le pouvoir des soviets. Lénine et Trotski eurent-ils tort de mobiliser l’armée rouge et de combattre ? Je demanderais aux pacifistes d’aujourd’hui si le 6 juin 44 au lieu de débarquer en Europe, les alliés auraient dû parlementer avec les nazis ? Auraient-ils dû laisser faire tout simplement, quand des millions de gens mouraient dans des camps, et que la résistance réclamait l’intervention ? Et pourtant…l’intervention : tant de victimes, tant de destructions. Au militant communiste, je demanderais si l’URSS aurait dû baisser la garde et laisser l’ennemi atteindre Moscou ? 

 Il y a un pacifisme qui m’apparaît trop militant pour être honnête. Je me souviens du temps –quand l’Allemagne était encore partagée– où les pacifistes de l’ouest exigeaient le démantèlement des fusées Pershing américaines…quand à quelques kilomètres de là les fusées soviétiques SS 20 étaient pointées sur l’ouest. Il y avaient donc de mauvaises fusées méchantes et meurtrières et d’autres dont on ne disait rien, probablement parce qu’elles étaient progressistes, armes de conquête d’une société future de bien-être et de paix.  

 Si la guerre est à éviter à tout prix, le pacifisme n’a pas réponse à tout. A se demander si parfois il ne cache pas autre chose, s’il n’est pas une manœuvre politique, autant que peut l’être à l’opposé la posture du va-t’en-guerre. Si solution il y a, elle doit être le résultat d’une réflexion, de concertation, je dirais aussi de franchise, car des intérêts sont en jeu, économiques, financiers, quelquefois aussi religieux, dont on parle trop peu, et là c’est de courage dont nous avons besoin. 

 Franchise et courage sont une seule et même chose. Dans les situations de crise, l’Histoire se rappelle à nous. Que savaient les alliés sur ce qui se passait en Allemagne et en Pologne et plus à l’est, que savaient-ils des horreurs perpétrées par les nazis ? Je veux dire que savaient-ils dans les années 40, 41, 42, 43… quand des millions de gens attendaient l’avancée des armées anglo-américano-soviétiques, quand les prisonniers des camps attendaient et souhaitaient même les bombardements ? Les alliés savaient, même s’ils ne savaient pas Tout, car Tout était impensable, inimaginable. Mais intervenir…où, comment, au prix de combien de vies humaines, des débarquements mal préparés aux conséquences douloureuses ont convaincu les alliés d’attendre. Il s’agissait alors non de pacifisme béat ni de manque de courage, et pourtant pendant ces longues années d’attente, des gens souffraient, d’autres chaque jour étaient exterminés. Il est des moments dans la vie où la rage nous fait fermer les poings et nous taire. 

 C’est peut-être ce qui se passe aujourd’hui, quand tout ce que nous connaissons d’un état en guerre, c’est que cette guerre oppose une dictature à une résistance dont nous savons trop peu de choses, sinon qu’elle est divisée, qu’elle rassemble des combattants aussi peu respectueux des droits humains que le dictateur lui-même. Une situation infiniment plus complexe que celle de la guerre civile espagnole en 1936. L’ennemi déclaré était le fascisme qui menaçait la république, il était facile pour un démocrate de choisir son camp, même si les démocraties auraient pu et dû faire beaucoup plus.  

 Quand il faut choisir entre la peste et le choléra, on est tenté de faire le gros dos et de cultiver son jardin. Ceux qui nous conseillent très fort de le faire ont des arguments à revendre : les révolutions arabes sont des machines à fabriquer de l’islam à tout va. Au point qu’on se demande si des dictatures laïques ne sont pas préférables… Ben Ali, Moubarak revenez, ils sont devenus fous !  

 Laissons-les, qu’ils règlent leurs problèmes eux-mêmes, clament ceux pour qui le monde s’arrête aux frontières de leur terroir. Point de vue égoïste qui –comble de malheur- coïncide avec une prudence qui est simplement celle de la raison. 

 

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09:14 Publié dans Colère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : guerre, crime, pacifisme

16/07/2011

Le jour du quatorze juillet

 

  

 La musique qui marche au pas cela ne me regarde pas. Voilà ce qu’au fond de moi je pense, comme beaucoup de gens pour qui l’armée c’est pour faire la guerre, c’est des violences, des viols, des meurtres, des morts, de la détresse. Le jour du quatorze juillet, bien avant d’entendre la chanson du poète, je restais dans mon lit douillet. Des millions de français n’ont pas attendu le discours pacifiste d’écologistes en campagne pour savoir où mènent les défilés militaires. 

 Seulement voilà. Ces mêmes personnes qui brocardent les défilés militaires ont souvent une conception étrange du pacifisme. J’ai encore en mémoire les slogans de ces manifestants qui hurlaient contre l’installation des fusées américaines Pershing en Allemagne. A quelques kilomètres de là, du côté est, des SS 20 soviétiques, ils ne disaient mot.  

 Quand les troupes soviétiques écrasaient dans le sang les révoltes des peuples hongrois, polonais ou allemands de l’est, certes, les écologistes n’existaient pas encore, mais leurs maîtres à penser n’occupaient pas les boulevards à Paris. Pire, ceux qui en France s’indignaient de voir des ouvriers, des étudiants, des gens épris de liberté réprimés sans pitié par la force des armes et des chars d’assaut, étaient raillés et accusés d’être des agents de l’autre camp. 

 On accuse les forces de l’OTAN de semer la mort en Afghanistan, on était moins bavard quand l’armée rouge occupait le même pays. Ce n’est pas tellement qu’il y aurait de bonnes guerres, et d’autres mauvaises, mais ce sont les belligérants qui sont à maudire ou à excuser selon les cas, surtout selon l’opinion. 

 Quand le terrorisme commet trois mille meurtres en un jour, qu’il promet le paradis aux assassins, qu’il s’en prend aux peuples, aux femmes, aux chrétiens, les discours pacifistes sonnent creux. Aussi creux que ceux qui, le 6 juin 44, auraient appelé à la paix. La paix pour qui ? Pour les nazis ?  

 La paix pour qui, aujourd’hui ? Pour les terroristes ? 

 Pacifisme, d’accord. Mais partout et toujours.  

 

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