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15/10/2010

Relents de fascisme

  

 Journal d’avant-hier. On en apprend un peu plus sur les violences ayant entraîné la suspension du match Serbie-Italie. Des « supporters » serbes qui s’apparentent plus à des groupes paramilitaires qu’à des amateurs de football s’en prennent d’abord à leur propre gardien de but (jugé par eux peu performant). Puis débordements, déprédations, nombreux blessés. Ce sont les mêmes qui pratiquent l’homophobie musclée dans leur pays. Une mouvance qui vient de plus loin, quand les chefs ultranationalistes serbes recrutaient des gros bras parmi les supporters de l’Etoile Rouge de Belgrade. Relents de fascisme. 

 Le même jour, au Blanc-Mesnil. Dans le vestiaire d’un collège, un élève de quinze ans est agressé par trois autres, qui lui masquent les yeux et le passent à tabac. Trente jours d’ITT, un pouce fracturé. Une source judiciaire confirme le caractère antisémite de l’agression. Quatre adolescents sont placés en garde à vue. Relents de fascisme. 

 Le même jour, Ahmedinejad visite le Liban sous les acclamations des partisans du Hezbollah. Face au public fanatisé, il appelle à la destruction d’Israël. Réactions dans le monde ? Ridicules. 

 Partout, l’obscurantisme marque des points. Jusque dans nos démocraties où à 8 heures le matin on entend (Europe1) une française bien de chez nous déclarer que le port du niqab l’a libérée, et qu’elle ressent « quelque chose de positif dans cette idée de vie commune et partagée entre un homme et plusieurs femmes », trouvant dans la polygamie « complicité » et « sécurité ». 

 Huit heures du matin. Deux mille dix. En France. Le pays de Montesquieu, de Louise Michel, de Jean Moulin. Le pays de 68, « Cours camarade, le vieux monde est derrière toi ». Mais ce n’est pas aux fascistes, aux racistes, aux islamistes qu’il faut s’en prendre. Ce ne sont que des brutes au crâne creux. Les responsables de cette situation, je les vois en haut, tout en haut des états, au sommet de ces belles démocraties qui jouent avec le feu. Exemple, à propos de l’agression antisémite rappelée plus haut. Le ministre de l'Education nationale condamne cette agression "avec la plus grande fermeté", annonçant qu'il présenterait "dans les prochains jours, une série de mesures destinées à ancrer la notion de vivre ensemble au coeur des écoles et des établissements scolaires". Il demande au recteur de l'académie de Créteil "de mener un travail spécifique de prévention du racisme et de l'antisémitisme au sein de cet établissement". 

« Ancrer la notion de vivre ensemble » ! Moulin à paroles. 

 Paris, de nos jours. Julia Jarmond, journaliste américaine installée en France depuis 20 ans, enquête sur l'épisode douloureux du Vél d'Hiv. En remontant les faits, son chemin croise celui de Sarah, une petite fille qui avait 10 ans en juillet 1942. (Orange actualités) 

 C’est sans aucun doute un très beau film. J’irai le voir et j’espère que les professeurs de troisième et de terminale y emmèneront leurs élèves. Car c’est bien de regarder le passé, de le rappeler à notre jeunesse, car les pires crimes commis par les hommes peuvent, si l’on en cherche les causes, nous permettre d’éviter qu’ils se reproduisent. La responsabilité des adultes d’aujourd’hui est grande, car les témoins des années noires, survivants des camps ou membres des familles des victimes sont maintenant très âgés. Les conférences qu’ils ont encore aujourd’hui les forces et le courage de tenir dans les écoles, dans peu de temps ils ne les tiendront plus. Il faudra pourtant maintenir vivante la mémoire, clouer le bec à ceux qui lèvent les bras au ciel l’air de dire « C’est vieux tout ça ! ». Non, vivre ensemble n’est pas une notion, c’est un combat. Combat contre l’indifférence, l’insouciance, l’ignorance.

 

01/09/2010

Juger les gens pour ce qu'ils font, non pour ce qu'ils sont

 

 D’abord l’indignation, puis la révolte, voilà comment un être humain peut réagir face à l’acte odieux commis par le pouvoir qui consiste à chasser des personnes dans le seul but de ramener à lui des milliers d’électeurs qui ne supportent pas la présence des gens du voyage sur leur territoire.

 

 Quelle lâcheté aussi ! Car il est facile de s’en prendre aux Roms qui n’ont pas d’attache, ne viennent de nulle part, provoquant depuis toujours la méfiance « des gens du terroir, des gens du cru », comme disait le poète. Facile pour un pouvoir de flatter le bon peuple « de souche » en lui chantant, mais sans l’humour de Brassens, la ballade des gens qui sont nés quelque part. Et ne parlez pas de la Roumanie qui n’est pas pour eux, loin s’en faut, une terre d’accueil. Il y a soixante-dix ans, les gens « du cru » ont su quoi faire de ces êtres vite catalogués comme asociaux. Errants, venant de partout et de nulle part, ils ressemblaient à s’y méprendre aux juifs, considérés aussi par les brutes nazies et la milice comme des parasites, des ennemis de l’intérieur.

 

  Doit-on pour autant approuver les propos tenus entre autres par des prélats, qui comparent le sort réservé aujourd’hui aux gens du voyage avec celui des tziganes et des juifs il y a soixante-dix ans. Halte là Messeigneurs ! Comparaison n’est pas raison. Surtout venant de l’église catholique, quand on sait le silence coupable qui a été le sien avant, pendant et après le génocide nazi. Le populisme du pouvoir actuel est encore compatible –malheureusement certes- avec les institutions et ne peut être comparé avec le national-socialisme qui programma, planifia et organisa l’extermination des peuples juif et tzigane. (Pas plus que je ne m’associe à ces prétendus défenseurs de la cause palestinienne qui parlent de génocide en Palestine, faisant des victimes d’hier les bourreaux d’aujourd’hui. Force est de constater ici des relents d’antisémitisme, qui n’ont rien à voir avec la critique de la politique des autorités israéliennes.)

 

 Maintenant parlons franc. Comme je le disais au début, je comprends l’indignation et la révolte de ceux qui voient dans l’expulsion des Roms un racisme à peine déguisé, compatible avec le sentiment d’une grande partie de la population qui en est encore à considérer les Roms comme des voleurs de poules. Sans parler de l’hygiène, de la saleté, des ordures, ma pauvre dame, et puis de quoi vivent-ils ? Bonne question ! Et ces voitures, ces caravanes de luxe, avec quel argent les ont-ils gagnées ? Alors que nous, bons français, gagnons difficilement notre pain, sans parler du chômage, des délocalisations, de la mobilité forcée, ne sommes-nous pas nous-mêmes devenus malgré nous des gens du voyage ?

 

 Bons français ! Parlons-en de l’hygiène, du tri des déchets, de la pollution automobile… Que celui qui n’a jamais jeté une machine à laver en forêt, un paquet de cigarette par la portière, que celui qui ne douche pas son enfant une fois par jour, qui ne se lave pas les mains en sortant des toilettes, que celui qui ne contribue pas au recyclage de ses déchets, qui jettent ses piles à la poubelle, que l’estivant qui laisse des emballages plastique sur la plage et autres seringues et détritus à risque, que les parents qui n’apprennent pas à leurs enfants le respect des lieux publics, à commencer par les toilettes des écoles, que tous ceux-là, français du haut du crâne jusqu’à la pointe des pieds, jettent la première pierre à ces gens qui déversent leurs ordures sur les talus d’autoroutes.

 

 Et puis ces bons bourgeois de gauche et de droite qui hurlent aujourd’hui leur indignation, où vivent-ils ? Bien au chaud au centre des villes, à l’abri des rixes de banlieue et des camps de Roms. Sont-elles prêtes ces bonnes âmes à accepter près de chez elles l’installation de gens du voyage ? Quand elles mettront leurs actes en accord avec leurs paroles, peut-être le peuple pourra-t-il les entendre. Et puis et puis cette critique du populisme d’un gouvernement en recherche de suffrages venant de démocrates d’occasion n’ayant pour objectif que leur retour au pouvoir ferait sourire si le problème n’était aussi grave. Quand on sait que pendant des années les mêmes ont laissé pourrir une situation qui fait de l’insécurité un problème majeur dans le pays.

 

 Je sais l’effort que font certaines municipalités pour accueillir les gens du voyage. L’effort des écoles aussi, des enseignants. Ce qu’il faut ? De l’eau, des raccordements, des ramassages, sur des terrains où je ne craindrais pas de planter ma tente, et puis la scolarisation des enfants, et puis du travail… mais ça, rien n’est facile ! A moins de considérer ces personnes malfaisantes par nature, vous voyez, vous, d’autre solution que de garder sur notre sol ceux qui y sont, et de les aider à vivre parmi nous ?

 

 Qu’on condamne ceux qui brûlent le drapeau d’un pays qui les héberge, ceux qui sifflent l’hymne national, ceux qui pratiquent la polygamie, ceux qui battent leur femme, ceux qui tiennent publiquement des discours contre les libertés et la démocratie, ceux qui appellent en chanson au meurtre des policiers, ceux qui profitent du travail des autres et des dizaines d’années de cotisations de travailleurs à la sécurité sociale, ceux qui profanent les cimetières et les lieux de culte, ceux qui s’en prennent violemment aux enseignants, aux pompiers, aux policiers, ceux qui inscrivent des insanités sur les tombes des soldats étrangers morts pour la France, ceux qui jettent des parpaings sur la cabine des TGV, ceux qui profitent grassement du trafic des armes et de la drogue dans les cités, que ces gens soient jugés et condamnés, d’accord. Qu’enfin la république se donne les moyens de faire régner la paix et la justice, d’accord. Mais cela n’autorise personne à désigner et expulser des femmes, des hommes et des enfants pour la seule raison qu’ils sont nés.

  

16/12/2009

XVI- Silhouette massive, présence de poils...

 Jennifer a bien pris le temps de les observer. Question observation, je me fie à son regard de femme, infiniment plus aigu et pénétrant que le mien. Ils ont le feu, me dit-elle. Silhouette massive, présence de poils sur les parties du corps qui en sont dépourvues chez nous, si l'on excepte les cas de certains individus repérés naguère sur les plages des lacs de Thuringe... Neandertal ? Oui, surtout la silhouette massive, accentuée par des proportions qui auraient surpris et peut-être intéressé Bruegel, Bosch ou les renaissants italiens : la longueur du torse et la petitesse des membres inférieurs. Ce sont des êtres primitifs. Je me souviens cependant en avoir entendu rire, quand au pied de la navette, l'un d'entre eux avait posé mon casque sur le haut de son crâne. Ces gens savent rire. Mon épouse prétend que ce n'était pas le cas des néandertaliens. Ils ne savaient ni parler ni rire. Enfin, d'après ce qu'on en sait dans les laboratoires... jusqu'à ce qu'un jour on découvre sur un ossement un gène témoignant d'une aptitude au langage, et d'une possibilité pour le cerveau de commander nerfs et muscles faciaux ! Bon. Même s'ils ne s'expriment que par cris, au moins ils savent rire. Les humains pourraient en prendre de la graine, y a-t-il meilleur moyen de communication que le rire ? Pour notre part, il nous a manqué, si les hommes s'étaient moins pris au sérieux, il n'y aurait pas eu de guerres, les préjugés et les dogmes en auraient pris un sacré coup, les « Je sais tout » auraient disparu des ondes radios et de la surface de la Terre, planète que nous n'aurions peut-être pas déserté, car au premier Grand Chef qui aurait annoncé la construction d'une centrale nucléaire près d'une zone sismique, la foule pliée en deux aurait répondu par un grand éclat de rire.

 

 Depuis quelques jours, nous avons abandonné nos tentes, et commencé à édifier des cabanes que nous aménageons du mieux que nous pouvons, le bois ne manque pas alentour, ce qui fait défaut par contre, ce sont les outils. Nous avions pensé à tout au moment d'embarquer : vêtements, albums de famille, conserves, jouets pour les enfants, souvenirs en tous genres, jusqu'aux appareils de photographie (alimentés par des piles, vous devinez la suite...) et nous avons fait l'impasse sur le nécessaire. Il est vrai que sur notre bonne vieille Terre, en ce siècle où tout effort physique était devenu superflu, les machines faisant tout à notre place, qu'aurions-nous fait d'une cognée, d'une machette, d'une scie ou d'une pioche ? Le malheur a voulu que nous nous posions sur une planète couverte de forêts, et le mot est faible, je devrais dire futaies : les arbres d'espèces inconnues (à vérifier, je ne suis pas bûcheron) sont d'une taille appréciable, pour certains le diamètre du tronc dépasse les deux mètres. Il nous faut aller loin dans les bois pour couper des arbustes pouvant constituer l'ossature de nos masures, et des branchages pour le treillis des murs. Couper avec quoi ? Des haches semblables à celle que je garde dans ma poche, mais emmanchées, ligaturées. Là je dois m'arrêter quelques instants.

 

 Comment nous sommes-nous procuré ces haches ? J'y reviendrai plus tard. Promis. Car aujourd'hui, il s'est passé quelque chose, j'ai retrouvé un vieil ami.

 

 Les autres occupent le village, ils se sont appropriés les cases après en avoir chassé leurs occupants. Ils sont nombreux, plus forts et surtout sans scrupules. Un de nos voisins de Lao Tseu (Eisenach à l'origine), m'ayant reconnu de loin, fit quelques pas dans notre direction. Cet homme accort, à l'esprit ouvert, est un ancien camarade de classe de Jennifer. Très au fait en matière de bricolage, il nous avait rendu moult services pour aménager notre jardinet, monter des meubles en kit, et même construire un garage attenant à la maison. Il s'approcha et siffla d'admiration. Il était peut-être là depuis un long moment à nous regarder élaguer les branchages, entrelacer les rameaux, creuser les trous pour les poteaux, planter ceux-ci, tasser autour, les lier avec ceux qui supporteront les charpentes. Quand il vit que je l'avais reconnu, il fit quelques pas dans ma direction. Poignée de main, sourire, bonjour, nous étions l'un et l'autre tellement heureux de reconnaître un visage familier dans ce monde étranger enveloppé de mystère ! Il promena son regard alentour. Tous les membres de notre groupe, femmes, hommes, et même enfants s'affairaient autour des constructions. Tandis que deux hommes, les mains vides, s'enfonçaient dans la forêt, d'autres surgissaient, traînant derrière eux une montagne de fagots. Aussitôt, des gamins se précipitaient pour accomplir la tâche qui leur avait été assignée : trier les branches, séparer les plus souples des cassantes, les répartir en plusieurs tas en fonction des longueurs. Helmut, c'est ainsi qu'après plusieurs années de bons et loyaux services, je m'étais permis de le nommer, Helmut restait ébahi.

 

  • - Pourquoi vous donner tout ce mal?

 

Je ramassai un caillou et le jetai adroitement au pied d'un poteau que deux femmes étaient en train de sceller en damant autour avec leurs pieds. A nouveau il rompit le silence :

 

  • - Zhu, tu m'écoutes? Il reste des cases libres, largement assez pour vous tous. Pourquoi vous donner tout ce mal? Les zozos ne reviendront pas, ils ont la frousse.

 

  • - A cause de la fille assassinée?

 

Sa femme était sur le point de le rejoindre, avait-elle l'intention de me saluer, ou s'approchait-elle seulement par curiosité ? Le fait que notre groupe se soit mis à l'écart ne pouvait longtemps passer inaperçu. Le temps qu'Helmut se retourne, elle avait déjà fait volte-face, une fourrure lui couvrait le dos et les reins.

 

  • - Tu disais?

 

  • - Je demandais s'ils avaient peur de nous à cause de ce qui était arrivé à cette jeune fille.

 

  • - Zhu! Ce ne sont même pas des sauvages! Ils crient comme les animaux! Tu as vu comment ils vivent?

 

  • - Je ne sais pas comment ils vivent, mais ils dormaient dans des cases, avant notre arrivée. Et ils étaient tous vivants.

 

  • - Après ce qu'on a vécu nous autres, tu ne crois pas qu'on a droit à quelques écarts?

 

  • - Vous venez d'exproprier une centaine d'innocents, une jeune fille est assassinée, et tu parles d'écarts?

 

  • - Ecoute, mon vieux, pour la fille je ne sais pas. C'est malheureux. Les gars de chez nous ne sont pas tous des enfants de chœur. Pour le reste, qu'on dorme à l'abri avec nos femmes et nos enfants, qui nous le reprocherait? A nous? Après ce qu'on a vécu.. Nous aussi on a été délogés. Pire que ça, ce ne sont pas nos maisons qu'on a quittées. C'est une planète. La planète!

 

  • - Nous n'avons pas été chassés par des hommes.

 

Du chantier, un cri étouffé parvint à nos oreilles :

 

  • - Zhu!

 

Du fond de notre case en construction, Jennifer m'interpellait, probablement lassée par ce long conciliabule avec notre ancien voisin. Sans rien avoir entendu de la conversation, avec le flair que je lui connais, elle en savait autant que moi sur son contenu.

 

  • - J'interdis aux enfants de porter les poteaux, si tu peux venir m'aider!

 

Helmut connaissait ma femme depuis la petite école, ils avaient ri, pleuré, joué, s'étaient chamaillés comme frère et sœur pendant des années, ils avaient passé les vacances ensemble, mais aujourd'hui, sur Astrée, la journée était bien avancée, Proxima déclinait, rouge, sur l'horizon, l'air se rafraîchissait et Helmut, laissant retomber ses bras sur les cuisses, me dit bonsoir et s'en retourna vers les siens, dans le village déserté par ces gens que dorénavant je n'appellerai plus les sauvages.

 

 A partir de ce jour, sans l'avoir décidé, les personnes de notre groupe prennent leurs distances avec ceux du « village ». Les quelques centaines de mètres qui nous séparent deviennent une marge infranchissable. Autant pour eux que pour nous. Même leurs enfants ne s'approchent pas. Quand aux indigènes, ils se sont réfugiés avec leurs familles dans les profondeurs de la forêt, nous savons qu'ils nous observent discrètement. Mieux que ça : il s'est passé quelque chose d'imprévisible. Au cours de leurs explorations et de leurs jeux, nos enfants ont rencontré les leurs. Après quelques moments d'expectative, ils se sont approchés. Ils ont vite fait connaissance. Ils ont l'air de bien s'entendre au point qu'on entend leurs rires résonner dans la futaie. Ils font des échanges. Leurs jouets disparaissent, on les voit revenir avec des lames et des haches en jade (c'est la pierre la plus répandue par ici). Ces outils à coup sûr leur ont été confiés par leurs parents qui ont deviné nos projets de construction. A ce propos, sans l'avoir voulu, nos cabanes ressemblent à leurs cases sauf l'absence de pisé, nous sommes semble-t-il en saison sèche (du moins je l'espère, je veux dire : j'espère qu'il y a des saisons, des pluies, du beau temps, de la neige...) et l'eau est rare. Nous colmaterons les murs quand le temps sera humide et quand la glaise nous collera aux pieds.

 

 Jennifer est perplexe. Les enfants, qui pour l'instant sont les seuls à approcher les Autres, nous informent sur leurs activités. Ils n'ont pas tenté à ce jour de reconstruire quelque chose qui ressemblerait à un village, ils vivent et dorment à la belle étoile. Ils chassent. Leurs armes sont rudimentaires : épieu, fronde, hache avec lesquelles ils tuent des lapins, des ovins sauvages et des chevreuils. Comment ces animaux sont-ils arrivés là ? Comment peut-il y avoir ailleurs que sur Terre des animaux terrestres ? Comment peut-il y avoir sur Terre des animaux semblables à ceux d'Astrée ? Jennifer me fait remarquer qu'on pourrait en dire autant des humains, ou de ce qui leur ressemble... Combien y avait-il de chances pour qu'existent à quatre années lumière de distance, des êtres vivants aussi ressemblants ? Une sur combien de milliards ?

 

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