Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

23/02/2019

Le poids du passé

 

 

 Nul besoin d’être parent, encore moins enseignant pour mesurer les difficultés de l’apprentissage. Expliquer, développer, répéter, surprendre, intéresser, tous les moyens sont bons pour amener l’enfant à la connaissance, pour faire de lui une personne accomplie. Il n’y a pas une méthode, mais des milliers de façons de faire. Il n’y a qu’à voir la succession des réformes de l’éducation, toutes plus prometteuses les unes que les autres, et puis condamnées, quand elles ne sont pas prohibées suite à un changement de ministre.

 Une chose certaine : à part quelques parents irresponsables ici ou là, tout le monde s’intéresse aux enfants. Avec parfois des idées inavouables derrière la tête d’obscurantistes de passage, les croyances et les dogmes sont toujours vivaces et ceux qui les colportent savent que c’est depuis le plus jeune âge que le bourrage de crâne est le plus efficace. Mais ce dernier n’est pas nécessairement le fait d’institutions malveillantes.

 Je remarque chez certaines personnes qui ont suivi des études, qu’on pourrait dire éclairées une tendance –parfois inconsciente- à revenir en arrière, là où leurs parents les avaient laissées. Comme s’il restait un lien, un cordon insécable avec les idées, les « façons de voir les choses » du foyer familial dans lequel elles ont appris à vivre et à penser. Certes, pour certains le retour en arrière est salutaire, quand l’éducation, les bons principes, avaient été transmis. Il y a heureusement parfois un moment pour reconnaître ses erreurs et se souvenir des bons conseils d’un père ou d’une mère.

 Mais il arrive qu’en dépit de la volonté d’assurer la bonne éducation à leurs enfants, des parents sans le savoir, sans le vouloir, dirigent ceux-ci dans une mauvaise direction. Ce n’est pas une question d’opinion : il y a des gens aux idées très arrêtées, et qui s’abstiennent d’infliger celles-ci aux petits dont ils ont la charge. D’autres n’ont pas ces scrupules et appliquent aux enfants ce qu’on leur a inculqué à eux-mêmes, comme si l’éducation pouvait se transmettre de génération en génération tels le bâton de relais passé entre les mains des coureurs. L’accumulation de pratiques, d’habitudes et de connaissances ne tient pas lieu d’éducation. Si un enfant n’est pas placé dans une situation où il peut questionner les adultes, et peu à peu s’interroger lui-même, comment pourra-t-il un jour : penser ?

 Je suis infiniment reconnaissant à mes parents d’avoir en toute occasion émis des réserves sur les idées toutes faites, les opinions tranchées, aussi il faut le dire sur les dogmes politiques et religieux. Chez eux on ignorait les systèmes en …isme qui finissent en prières, en mensonges, en défilés pour finir en violence. Il y eut des éclats, quand c’est moi-même qui, adolescent, voulait tout renverser. Maintenant je sais qu’ils avaient raison. Ils m’ont laissé libre. Et si je regarde en arrière, je dois à ma mère et à mon père de m’avoir éduqué pour le mieux, en préservant dans tous les cas pour moi la possibilité du libre-arbitre.

 

§

05/12/2018

Pourquoi donc ces gens-là...

 

 

...ne sont-ils pas contents ? Ils disent que leurs déplacements leur coûtent de plus en plus cher, qu’ils ont du mal à boucler leurs fins de mois, qu’ils n’arrivent plus à vivre et à faire vivre leur famille décemment ni à s’accorder des loisirs. Ils disent qu’ils ne sont pas insensibles au danger que la pollution automobile fait peser sur l’environnement, mais que pour un artisan, un ouvrier, un paysan, un commerçant vivant loin des métropoles, l’achat de véhicules propres n’est aujourd’hui financièrement pas possible.

 Nous vivons heureusement dans un pays où le droit de manifestation est respecté. On nous le rappelle d’ailleurs régulièrement, le rôle des forces de l’ordre étant d’éviter tout débordement susceptible d’empêcher les protestataires de se faire entendre. Ce qui est nouveau aujourd’hui, c’est que des manifestants par centaines de milliers répartis sur tout le territoire ne sont ni mobilisés ni encadrés ni représentés par une association, un parti politique ou un syndicat. Finalement ils ne représentent qu’eux-mêmes. On peut comprendre le désarroi du personnel politique du pays. La tradition veut que les mots d’ordre, les slogans, les calicots exhibés dans les cortèges soient compatibles avec les revendications et les programmes élaborés dans les sphères responsables, les bureaux syndicaux, les comités centraux, les comités de grève, bref les instances représentatives le plus souvent élues. Or dans le cas présent, il n’en est rien : pas de leader, pas de programme. Incroyable, inquiétant.

 On connaît les fonctionnaires, les ouvriers, les cheminots, les techniciens de surface, les commerçants, les restaurateurs, les aubergistes, les éboueurs, les paysans, les artisans, les routiers, les chauffeurs de taxi, les pêcheurs, les retraités, les jeunes des banlieues, on connaît même les délinquants, les racistes, les gauchistes, les fascistes et les homophobes, mais quand tous ces gens sont rassemblés, on ne sait plus qui ils sont. On utilise un artifice, en les identifiant par la couleur de leur gilet. Ils sont en nombre certes mais pas suffisamment pour qu’on parle de population. Comme on ne peut pas expliquer le phénomène, la moquerie tient lieu d’analyse. Le monde éclairé –ou qui croit l’être- nous parle de « beaufs », « d’homophobes », de « racistes », de gens sans culture, et toise ces centaines de milliers de gens avec mépris et condescendance. Tout juste si on ne parle pas d’une révolte de rustauds.

 On entend peu les commentateurs évoquer le « peuple ». Six lettres lourdes de sens et qui nous renvoient autant à la sociologie qu’à l’Histoire pour un concept non encore estampillé par la magistrature syndicale et politique. Par les syndicats parce qu’au-delà des catégories qu’ils défendent, ils ignorent les autres. Par les partis de droite parce que derrière ce mot, d’autres plus terribles encore leur viennent en mémoire, et pas seulement des mots. Par les partis de gauche parce qu’il leur reste quelques stigmates de marxisme et qu’ils peinent à analyser une situation sans faire référence à la division de la société en classes sociales antagonistes.

 Et pourtant, quand on enseigne la Révolution française aux élèves des écoles, on dit que le peuple a pris d’assaut la Bastille. Si un enfant nous demande ce que c’est que ce peuple qui a mis fin à des siècles d’injustice, que devra-t-on lui dire ? Qu’il s’agit des pauvres ? Des gueux ? Des Jacques ? Des vilains ? Mais il faudra qu’on lui parle des philosophes, des encyclopédistes, des réformateurs, des utopistes, des révolutionnaires, des orateurs, du tiers-état, des bourgeois, sans parler des bandits, des apôtres de la terreur, des va-t-en guerre, des justiciers mais aussi des vengeurs, bref d’une multitude de gens qui ont tous peu ou prou participé à la chute de l’ancien régime.

 Donc on ne parle de peuple que dans le cas d’une révolution. Brrrr… Restons-en aux personnes qui portent des gilets jaunes !

 

 

§

17/11/2018

Aujourd’hui tout est difficile

 

 

 

Difficile de mettre en place des barrages à cause des forces de l’ordre.

Difficile d’atteindre l’autoroute, mais que fait donc la police ?

Difficile de ne pas s’énerver.

Difficile de se faire entendre.

Difficile de prendre le volant.

Difficile de ne pas le prendre.

Difficile d’entendre des alertes sur des catastrophes qui n’auront lieu que dans longtemps.

Difficile d’entendre les plaintes de la province quand on a le métro, le bus, un lieu de travail à cent mètres ou pas de lieu de travail du tout.

Difficile de payer un euro soixante le litre de carburant.

Difficile de se passer d’un home cinéma, d’ipades, de tablettes, de jantes en alu, de véhicules 4x4 et d’autres objets de première nécessité.

Difficile de diminuer les taxes.

Difficile de diminuer les dépenses publiques.

Difficile d’éviter le blocage du pays si c’est pour provoquer des grèves contre la diminution du nombre de fonctionnaires.

Difficile de gouverner un pays où tout est difficile.


§