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21/04/2013

Des mots

 

 Selon le Petit Robert, c’est « un mouvement d’agacement, d’impatience, d’irritation ». Tel qu’il est employé, « senti » par nos commentateurs radiophoniques, le mot a un sens différent et mérite qu’on s’y arrête. Crispé, crispation. J’écoutais un reportage sur les conditions de travail dans les entreprises, et plus précisément, comme rien n’est plus important aujourd’hui que le problème (il faut dire problématique) religieux, celui des prières sur le lieu de travail. Bref, on prend son tapis, on s’installe quelque part en évitant un couloir pour ne gêner personne, on s’oriente vers La Mecque, et le tour est joué ? Oh que non ! Il y a des patrons pour qui religion et boulot sont incompatibles. La prière vous la faîtes chez vous, religion affaire privée et tout et tout. La commentatrice s’indigne, avec le sourire car nous sommes en radio publique où les pires méchancetés se disent la bouche en cul de poule : Oui, chers auditeurs, il y a encore des patrons qui restent crispés sur la vieille idée qu’ils se font de la laïcité 

 On voit que la crispation n’est pas réductible ici à un mouvement d’agacement, d’impatience, d’irritation. La journaliste ne s’adresse pas exclusivement aux patrons désignés. Elle vise plus loin, ceux pour qui la pratique de la religion est un droit inaliénable, à la condition qu’il n’empiète pas sur la vie des autres. En gros, les défenseurs ratatinés, recroquevillés, rabougris, racornis de la laïcité sont, comme des huîtres collées au rocher, accrochés, rivés, menottés, scotchés, attachés à des idées qui ont fait leur temps. Allez, vieux grognards de la république, circulez ! La modernité aujourd’hui, c’est d’accepter le fait religieux même si parfois quelques abus très minoritaires… Et voyez un peu la richesse que ces croyants venus d’ailleurs nous apportent, détendez-vous, pliez les genoux, faîtes semblant de croire, et bientôt vous croirez (1).  

 Mais surtout, il ne faut stigmatiser personne et surtout pas les religieux. C’est correct politiquement de condamner les sectes, sauf quand elles regroupent plusieurs millions de personnes sur le sol national. Elles deviennent alors tout à fait respectables. Et gare à celui qui leur refuserait le droit d’exister, de se manifester, de pavoiser, de recruter. De celui-ci, on dit qu’il stigmatise. En voilà un mot à la mode. De la stigmatisation, on ferait presque un délit, une attitude proche du racisme, consistant à désigner à la vindicte publique une catégorie d’individus. On a vu de tels monstres au siècle passé, qui étaient fort navrés que l’apparence de ceux qu’ils voulaient anéantir ne se distingue pas de celle du commun des mortels. Ils leur faisaient alors porter un signe distinctif afin que chacun puisse les reconnaître, le signe devenant à son tour celui d’une culpabilité. Honteuse stigmatisation qui eut comme conséquence le pire des crimes contre l’humanité. 

 J’ai l’impression que ceux qu’on stigmatise aujourd’hui ne sont pas ceux qu’on croit. Il est de plus en plus correct politiquement d’assimiler les libres penseurs aux identitaires racistes de l’extrême droite. Qui veut noyer son chien… 

 Pour les démocrates que nous sommes, l’amalgame est insupportable. Et puis les islamistes dans leur accoutrement n’ont pas besoin qu’on les stigmatise, ils le font tout seuls.  

 

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(1) Georges Brassens, "Le mécréant"

 

12/04/2013

Question de sphères

 

 

 Bourgeois bohèmes parisiens et d’ailleurs, vieux grognards de la gauche, anciens combattants de l’extrême, preux chevaliers fermes sur les principes quand ils les arrangent, anticléricaux intransigeants mais pas toujours, révolutionnaires qui sortent de leur salon pour se rencontrer et se convaincre qu’ils sont l’intelligence du monde, soldats de l’avant-garde pour la révolution mondiale qui bientôt mettra fin à toutes les injustices que le capitalisme génère, ces rebelles de 1968 n’ont retenu qu’une chose : qu’ils y étaient.

 Le verbe haut, ils nous disent aujourd’hui que la religion est l’opium du peuple… mais pas dans tous les cas. Prenons l’exemple du voile islamique. Ils présentent une candidate voilée aux élections législatives, et sont pour l’interdiction du voile dans le service public ! Ils en auraient presque des sanglots dans la voix. Pas touche à la sphère publique ! Pas de signes religieux dans les écoles ! Pas de croix, pas de kippa non plus ! Tout le monde sait que la laïcité en France est menacée par la prolifération du judaïsme menaçant, quand au catholicisme s’il est vrai qu’il faut rester vigilant, il n’impose pas aux femmes et aux jeunes filles un accoutrement humiliant. Derechef ils nous font un cours de droit sur la distinction entre sphère publique et sphère privée.

 La Fédération nationale de la libre pensée nous rappelle le jugement de la cour de cassation à propos de l’affaite Baby lou : le principe de laïcité n’est pas applicable aux salariés des employeurs de droit privé qui ne gèrent pas un service public. Ce jugement est fondé sur le précepte suivant : une crèche privée n’est pas chargée d’une mission de service public. Et nos « laïques » d’emboîter le pas des magistrats. Ils se félicitent qu’on ait « rétabli dans ses droits » une employée voilée dans une crèche.

 Voilà des libres penseurs bien procéduriers ! Une étrange façon de séparer au couteau les domaines public/privé. La nature de la tâche à accomplir dans une crèche est-elle d’ordre privé ? Si cette institution est religieuse, personne ne tiendra grief à l’employeur d’accepter des employés portant des signes religieux, et surtout pas les parents. Ce n’était pas le cas de la crèche Baby lou. Ni d’un nombre grandissant de crèches et d’écoles privées qui n’ont rien de confessionnel. Crèches et écoles où des gens sans religion inscrivent leurs enfants pour différentes raisons : pas de crèche publique, école publique aux classes surchargées ou fréquentées par des enfants violents, pas ou peu éduqués, maîtres et maîtresses débordés dans l’impossibilité de remplir leur fonction d’enseignants. Des gens qui étaient fidèles à l’école publique l’abandonnent aujourd’hui. Vont-ils pour autant accepter que leur enfant soit accompagné voire éduqué par une personne qui couvrira une partie de son corps et qui sera fatalement amenée à expliquer pourquoi ?

 Ils disent : la loi de 1905, rien que la loi de 1905 ! Mais nous ne sommes plus en 1905 ! Un siècle après le vote de cette loi, bien des choses ont changé. On ne pourra pas éternellement se retrancher derrière la loi, et ce n’est pas à des libres penseurs que je vais faire la leçon. La république est aujourd’hui confrontée à un problème nouveau : l’islam. Il faut être aveugle, ou faire semblant de ne rien voir pour ignorer le fait. L’islam est plus, beaucoup plus qu’une religion. Chaque jour apporte dans notre pays son lot d’infractions, de tentatives pour mettre en cause ce pilier de la république qu’est la laïcité. On tente le foulard ici, la burka quand c’est possible, on moleste un policier qui veut verbaliser, on se présente à l’école avec un tee-shirt portant une inscription incitant au jihad. On frappe des homosexuels ou des jeunes filles non voilées dans des quartiers où des caïds se croient investis d’une mission divine. On cherche à imposer la loi islamique dans les hôpitaux. Des professeurs prennent mille précautions avant d’aborder certains faits historiques, ou d’exposer des données scientifiques pourtant incontestables. Dois-je poursuivre ? L’islam est plus qu’une religion. Ce serait gentil de dire que c’est un mode de vie. Je pencherais plutôt pour l’entreprise totalitaire. Mais une entreprise beaucoup plus habile que le modèle fasciste que nos parents ont connu. Les islamistes sont de fins diplomates, qui savent parler, prendre des allures compatibles avec l’idéologie qui imprègne la classe politique : celle du vivre ensemble, de l’apologie du multiculturalisme, du respect de la diversité culturelle. Finalement, les diffuseurs de l’islam n’ont pas besoin d’avocats. A droite comme à gauche, nos dirigeants imprégnés d’esprit concordataire sont prêts à tout accepter, le voile, la construction de mosquées avec l’argent public, et pourquoi pas le remodelage des programmes et manuels scolaires. Ils hurlent à l’islamophobie, feignant d’y voir du racisme, comme si l’islam était une race. Non, de même qu’on peut être anticlérical sans être anti-français, on peut être islamophobe –et au sens premier, avoir peur de l’islam- et fréquenter des perses, des indonésiens, des français ou des arabes. D’ailleurs dans les pays où l’islam fait la loi, des gens courageux, de vrais laïques ceux-là, se battent pour la liberté, pour que les femmes se découvrent et existent, pour que les filles se rendent à l’école. Ils doivent s’étonner là-bas qu’on fasse autant d’histoires ici avant d’interdire à une bigote de porter le voile dans une crèche. Surtout quand ces tergiversations se font au nom de la libre pensée.

 

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03/04/2013

Une situation propice aux déclamations de tribuns. Méfiance.

 

 

Ces gens méritent la double peine. Au mensonge sur leurs malversations, s’ajoute leur prétention à être des chevaliers blancs. Ils étaient même allés jusqu’à dire qu’ils n’aimaient pas les riches. Voilà nos donneurs de conseils pris la main dans le sac, en flagrant délit de mensonge. Socialistes ? Tout ce qu’ils méritent c’est un énorme éclat de rire. 

 Mais nous ne rirons pas longtemps. Socialisme ou pas, gauche ou droite, la crise touche tous les autres, ceux qui ne parlent pas dans le poste. Les chômeurs sont là. Et les travailleurs qui en fin de mois, n’ont pas d’argent en Suisse, pas plus qu’ils n’en ont en France. 

 La deuxième peine serait qu’une fois pour toutes le peuple « de gauche » comme ils disent, ne leur accorde plus sa confiance. Mais ça, je n’y crois pas. Ou alors il faudrait qu’on tire les leçons de l’histoire, et c’est au-dessus de nos forces. Quand ils se présenteront à nouveau devant nous, et qu’ils promettront justice, égalité et solidarité, tous comme un seul homme, j’entends les gens de bien, ceux qui veulent que les choses changent, qui espèrent, qui pensent à leurs enfants, qui voient la société future comme un havre de bien-être et de paix, ceux-là comme un seul homme accorderont encore leur confiance à des gens qui du socialisme ont tout oublié, même le discours. 

 Non, ne me parlez pas des conquêtes ouvrières ni des avancées sociales. Ce n’est pas à eux, ce n’est pas à la gauche qu’on les doit, mais à ceux qui les voulaient ces conquêtes et ces droits, qui se sont privés de journées de salaire, sont descendus dans les rues. Ils ont pris la main de ceux qui parlaient si bien en leur nom, et les ont fait signer. Il est arrivé aussi qu’ils les empêchent de signer la mise en cause de ce qui avait été gagné de haute lutte. 

 Aujourd’hui, personne n’est à même de piloter le navire. On y est tous un peu pour quelque chose, on s’est assoupi trop longtemps et la nuit n’est pas bonne conseillère. Le réveil, ce n’est pas de tendre l’oreille à ceux qui nous préparent des lendemains qui ressembleraient à ce que nos parents ont vécu hier. La situation est propice aux déclamations de tribuns habillés de rouge ou de brun. Méfiance. Il y a aussi les autres, ceux du troisième type qui grignotent chaque jour un petit morceau de république, qui creusent leur nid dans les quartiers, les stades, les médias, mais surtout dans les esprits. Ceux-là savent se taire quand il faut et quand ils parlent, les démocrates que nous sommes jugent qu’il est normal qu’on donne la parole à tout le monde. Mais quand un représentant de l’état viole la loi et ment, ceux qui ont la république dans le collimateur peuvent se réjouir, la république se dévore toute seule.  

 

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11:19 Publié dans libre pensée | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : république